28 Déc Contrats de travail – Modification
Cass., Soc., 8 décembre 2021, n° 20-13905.
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Selon l’article 1er, § 1, du règlement n° 44/2001 du Conseil, du 22 décembre 2000, concernant la compétence judiciaire, la reconnaissance et l’exécution des décisions en matière civile et commerciale, ce dernier s’applique en matière civile et commerciale et quelle que soit la nature de la juridiction.
Aux termes de l’article 1er, § 2, sous b), de ce règlement sont exclus de son application les faillites, concordats et autres procédures analogues.
Aux termes de l’article 3, §1, du règlement n° 1346/2000 du Conseil, du 29 mai 2000, relatif aux procédures d’insolvabilité, les juridictions de l’État membre sur le territoire duquel est situé le centre des intérêts principaux du débiteur sont compétentes pour ouvrir la procédure d’insolvabilité.
Cette disposition attribue également une compétence internationale aux juridictions de l’État membre sur le territoire duquel a été ouverte la procédure d’insolvabilité pour connaître des actions qui dérivent directement de cette procédure et qui s’y insèrent étroitement (CJCE, arrêt du 12 février 2009, Seagon, C-339/07, points 21 et 22).
Seules les actions qui dérivent directement d’une procédure d’insolvabilité et qui s’y insèrent étroitement sont exclues du champ d’application du règlement n° 44/2001. Par voie de conséquence, seules ces actions entrent dans le champ d’application du règlement n° 1346/2000 (CJUE, arrêt du 9 novembre 2017, [G] France et [G] Maschinenbau, C-641/16, point 19).
S’agissant du premier critère, afin de déterminer si une action dérive directement d’une procédure d’insolvabilité, l’élément déterminant pour identifier le domaine dont relève une action est non pas le contexte procédural dans lequel s’inscrit cette action, mais le fondement juridique de cette dernière. Selon cette approche, il convient de rechercher si le droit ou l’obligation qui sert de base à l’action trouve sa source dans les règles communes du droit civil et commercial ou dans des règles dérogatoires, spécifiques aux procédures d’insolvabilité (CJUE, arrêt du 9 novembre 2017, [G] France et [G] Maschinenbau, C-641/16, point 22).
Pour déclarer la juridiction prud’homale incompétente pour connaître de l’action tirée de la violation du droit au transfert du contrat de travail du salarié, l’arrêt retient, en premier lieu, que la matière du transfert du contrat de travail lorsque survient une modification dans la situation juridique de l’employeur, telle qu’elle s’évince de l’article L. 1224-1 du code du travail, est équivalente à celle de la directive n° 2001/23/CE du Conseil, du 12 mars 2001, concernant le rapprochement des législations des États membres relatives au maintien des droits des travailleurs en cas de transfert d’entreprises, cette directive étant aussi d’effet direct au Royaume-Uni, en deuxième lieu, que la procédure collective d’« administration » de l’Insolvency Act 1986 qui régit la procédure anglaise du « pre-packaged administration », dans sa version applicable au litige, est visée à l’annexe A du règlement nº 1346/2000 et que cette annexe A a la même autorité que son règlement, en troisième lieu, que les articles 16 et 17 du règlement n° 1346/2000 imposent à tout État membre de reconnaître la décision d’ouverture d’une procédure d’insolvabilité dès que celle-ci produit ses effets dans l’État d’origine sans que puisse être vérifiée la compétence des juridictions de cet État, l’article 26 de ce règlement autorisant tout État membre à refuser de reconnaître une procédure d’insolvabilité ouverte dans un autre État membre ou d’exécuter une décision prise dans le cadre d’une telle procédure seulement lorsque cette reconnaissance ou cette exécution produirait des effets manifestement contraires à son ordre public, en particulier à ses principes fondamentaux ou aux droits et aux libertés individuelles garantis par sa Constitution et, en quatrième lieu, que l’action du salarié fondée sur la fraude à la loi anglaise ou aux règles de conflits de lois ou de juridictions en matière de transfert du contrat de travail dérive directement de la procédure d’insolvabilité du Royaume-Uni où est situé le centre des intérêts principaux des débiteurs et s’y insère étroitement.
En statuant ainsi, alors que l’action du salarié était fondée sur l’article L. 1224-1 du code du travail prévoyant en cas de survenance d’une modification dans la situation juridique de l’employeur, la subsistance, entre le nouvel employeur et le personnel de l’entreprise, de tous les contrats de travail en cours au jour de la modification, que le bénéfice de cette disposition ne requiert pas l’ouverture préalable d’une procédure d’insolvabilité au sens du règlement n° 1346/2000, que son objet est la poursuite des contrats de travail des salariés, que l’exercice d’une telle action ne requiert pas l’intervention d’un syndic, au sens de l’article 2 du règlement n° 1346/2000, et ne tend pas au remboursement partiel des créanciers de sorte que l’action du salarié ne dérivait pas directement d’une procédure d’insolvabilité, la cour d’appel a violé les textes susvisés.