04 Avr Droit du travail – avril 2024
Statut collectif du travail – Transport sanitaire.
Cass., Soc. 27 mars 2024, n° 22-15519.
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L’activité de transport sanitaire :
– liée au transport assis professionnalisé par taxi conventionné par une caisse primaire d’assurance maladie ;
– n’entre pas dans le champ d’application de la convention collective nationale des transports routiers et activités auxiliaires du transport du 21 décembre 1950 laquelle, au titre du transport sanitaire, vise seulement l’activité « Ambulances».
Représentation des salariés – CSE.
Cass., Soc., 20 mars 2024, n°23-18331.
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Il résulte de la combinaison des articles L. 2143-3, L. 2143-6, L. 2143-22, L.2312-1 et L. 2314-2 du code du travail :
– que le législateur n’a prévu la possibilité de désigner un représentant syndical au CSE distinct du délégué syndical que dans les entreprises de plus de trois cents salariés ;
– et que, dans les entreprises de moins de cinquante salariés dans lesquelles la désignation d’un délégué syndical en application des dispositions de droit commun de l’article L. 2143-3 du code du travail est exclue, les dispositions de l’article L. 2143-22 ne sont pas applicables.
Il en est de même de la désignation dérogatoire :
– dans les entreprises de moins de cinquante salariés ;
– d’un délégué syndical résultant d’une disposition conventionnelle ;
– telle que l’article 8 de la convention collective nationale de travail des établissements et services pour personnes inadaptées et handicapées du 15 mars 1966.
Procédure disciplinaire – Sanction.
Cass., Soc., 20 mars 2024, n°22-17292.
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Le caractère tardif de la demande d’avis des délégués du personnel :
– prévue par l’article 4.2 de l’annexe III relative au personnel navigant technique du règlement intérieur de la société Air France avant le prononcé d’une sanction ;
– constitue une irrégularité dans le déroulement de la procédure disciplinaire ;
– et, en cas de litige, il appartient au juge de rechercher si cette irrégularité a privé le salarié de la possibilité d’assurer utilement sa défense ou est susceptible d’avoir exercé une influence sur la décision finale de sanctionner par l’employeur.
Statut collectif – Contrat de travail intermittent.
Cass., Soc. 14 mars 2024, n° 22-14004.
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La durée de la prescription étant déterminée par la nature de la créance invoquée, l’action en paiement :
– d’un rappel de salaire fondée sur la requalification d’un contrat de travail intermittent en contrat de travail à temps complet ;
– est soumise à la prescription triennale prévue par l’article L. 3245-1 du code du travail.
La cour d’appel :
– qui a retenu que la demande du salarié tendant à la requalification de son contrat de travail intermittent en contrat de travail à temps complet s’analysait en une réclamation en paiement de salaire ;
– en a exactement déduit que sa demande était soumise à la prescription triennale de l’article L. 3245-1 du code du travail.
Aux termes de l’article L. 3123-3 du code du travail (rédaction antérieure loi n° 2016-1088 du 8 août 2016) :
– dans les entreprises pour lesquelles une convention ou un accord collectif de travail étendu ou une convention ou un accord d’entreprise ou d’établissement le prévoit ;
– des contrats de travail intermittent peuvent être conclus afin de pourvoir les emplois permanents, définis par cette convention ou cet accord, qui par nature comportent une alternance de périodes travaillées et de périodes non travaillées.
Aux termes de l’article L. 2322-4 du même code (rédaction antérieure loi n° 2012-387 du 22 mars 2012) :
– lorsqu’une unité économique et sociale regroupant cinquante salariés ou plus est reconnue par convention ou par décision de justice entre plusieurs entreprises juridiquement distinctes ;
– la mise en place d’un comité d’entreprise commun est obligatoire.
Il en résulte que l’accord collectif conclu dans le périmètre d’une unité économique et sociale est un accord d’entreprise.
Exécution du contrat de travail – Contrat d’accompagnement dans l’emploi.
Cass., Soc. 13 mars 2024, n° 22-20031.
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Un contrat d’accompagnement dans l’emploi peut :
– par exception au régime de droit commun des contrats à durée déterminée ;
– être contracté pour pourvoir un emploi lié à l’activité normale et permanente des collectivités, organismes, personnes morales et sociétés concernés.
La seule mention « contrat d’accompagnement dans l’emploi » :
– qui fait référence aux dispositions de l’article L. 1242-3 du code du travail (rédaction antérieure loi n° 2020-1674 du 24 décembre 2020) ;
– suffit à satisfaire à l’exigence de définition du motif du contrat à durée déterminée prévue à l’article L. 1242-2 du code du travail (rédaction antérieure loi n° 2016-1088 du 8 août 2016).
Il en résulte que :
– lorsqu’en sus de la mention « contrat d’accompagnement dans l’emploi », un contrat de travail contient un des motifs de recours au contrat à durée déterminée visés à l’article L. 1242-2 du code du travail ;
– il y a lieu de retenir comme seul motif de recours celui relatif au contrat aidé.
Aux termes de l’article L. 3123-16 du code du travail (rédaction antérieure la loi n° 2016-1088 du 8 août 2016) :
– l’horaire de travail du salarié à temps partiel ne peut comporter, au cours d’une même journée ;
– plus d’une interruption d’activité ou une interruption supérieure à deux heures.
Toutefois :
– une convention ou un accord collectif de branche étendu, ou agréé en application de l’article L. 314-6 du code de l’action sociale et des familles ;
– ou une convention ou un accord d’entreprise ou d’établissement peut déroger à ces dispositions en définissant les amplitudes horaires pendant lesquelles les salariés doivent exercer leur activité et leur répartition dans la journée de travail ;
– moyennant des contreparties spécifiques et en tenant compte des exigences propres à l’activité exercée.
Prud’hommes – Contestation du licenciement pour inaptitude.
Cass., Soc., 13 mars 2024, n° 21-25827.
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La demande de dommages-intérêts formée devant la cour d’appel :
– par le salarié aux fins d’indemnisation des conséquences de son licenciement en raison d’une inaptitude consécutive à un accident du travail ou une maladie professionnelle ;
– tend aux mêmes fins que celle, soumise aux premiers juges, qui vise à obtenir le paiement des indemnités légales propres à la rupture du contrat par l’employeur à raison de son inaptitude au poste ;
– de sorte que la demande d’indemnité spéciale de licenciement présentée en cause d’appel est recevable. »
Réglementation et durée du travail.
Cass., Soc., 13 mars 2024, n° 21-20421.
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Le défaut de mention dans le contrat de travail :
– des plages prévisionnelles d’intervention et des plages d’indisponibilité, prévues par la convention collective, de la salariée, auxiliaire de vie sociale à temps partiel :
– ne permet pas de présumer que le contrat est à temps complet.
Règlementation et durée du travail.
Cass., Soc., 13 mars 2024, n°22-11708.
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Aux termes de l’article L. 3121-1 du code du travail (rédaction antérieure loi du 8 août 2016), la durée du travail effectif :
– est le temps pendant lequel le salarié est à la disposition de l’employeur ;
– et se conforme à ses directives sans pouvoir vaquer à des occupations personnelles.
Selon l’article L. 3121-4 du code du travail (rédaction issue loi du 8 août 2016), le temps de déplacement professionnel :
– pour se rendre sur le lieu d’exécution du contrat de travail ;
– n’est pas un temps de travail effectif.
Toutefois, s’il dépasse le temps normal de trajet entre le domicile et le lieu habituel de travail, il fait l’objet d’une contrepartie soit sous forme de repos, soit financière.
Cette contrepartie est déterminée :
– par convention ou accord collectif de travail ;
– ou, à défaut, par décision unilatérale de l’employeur prise après consultation du comité d’entreprise ou des délégués du personnel, s’il en existe.
La part de ce temps de déplacement professionnel coïncidant avec l’horaire de travail n’entraîne aucune perte de salaire.
Harcèlement sexuel – Rémunération.
Cass., Soc., 13 mars 2024, n°22-20970.
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Si la connotation sexuelle des messages adressés par le salarié à son assistante, à une salariée intérimaire et à une troisième salariée et la gêne occasionnée par la situation imposée par leur supérieur hiérarchique :
– créent une situation intimidante ou offensante de nature à caractériser un harcèlement sexuel ;
– et à rendre impossible le maintien du salarié dans l’entreprise au sens de l’article L. 1153-1 du code du travail ;
– toutefois, un tel comportement « ne caractérise pas le défaut de respect des exigences d’honorabilité prévu par les dispositions légales ni le comportement professionnel à risque » au sens bancaire et financier ;
– de sorte que la rémunération variable différée reste donc due.
Exécution du contrat de travail – Accident du travail ou maladie non professionnelle.
Cass., Soc., 13 mars 2024, n° 22-18758.
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Il résulte des articles L. 1226-2 et L. 1226-2-1 du code du travail :
– que l’employeur peut licencier le salarié s’il justifie du refus par celui-ci d’un emploi proposé dans les conditions prévues à l’article L. 1226-2 du code du travail, conforme aux préconisations du médecin du travail ;
– de sorte que l’obligation de reclassement est réputée satisfaite.
Viole ces dispositions la cour d’appel :
– qui juge dépourvu de cause réelle et sérieuse le licenciement pour inaptitude d’un salarié qui avait refusé un poste à mi-temps ;
– conforme aux préconisations du médecin du travail, proposé par l’employeur ;
– au motif qu’il entraînait, par la baisse de rémunération qu’il générait, une modification de son contrat de travail que le salarié pouvait légitimement refuser.
Contrat de travail et rupture conventionnelle.
Cass., Soc., 13 mars 2024, n° 22-10551.
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L’article L. 1237-12 du code du travail n’instaure pas de délai entre :
– d’une part l’entretien au cours duquel les parties au contrat de travail conviennent de la rupture du contrat ;
– d’autre part la signature de la convention de rupture prévue à l’article L. 1237-11 du code du travail.
Rupture du contrat de travail – messages privés.
Cass., Soc., 6 mars 2024, n° 22-11016.
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Le salarié a droit :
– même au temps et au lieu de travail, au respect de l’intimité de sa vie privée ;
– de sorte qu’un motif tiré de la vie personnelle du salarié ne peut justifier, en principe, un licenciement disciplinaire ;
– sauf s’il constitue un manquement de l’intéressé à une obligation découlant de son contrat de travail.
Doit être approuvé l’arrêt de la cour d’appel qui retient que l’employeur ne peut :
– pour procéder au licenciement d’un salarié, se fonder sur le contenu de messages ;
– qui, même s’ils avaient été envoyés au moyen de la messagerie professionnelle, relèvent de la vie personnelle du salarié ;
-dès lors, d’une part, que ces messages s’inscrivaient dans le cadre d’échanges privés, à l’intérieur d’un groupe de personnes ;
– et n’avaient pas vocation à devenir publics, d’autre part, que les opinions exprimées par la salariée n’avaient eu aucune incidence sur son emploi ou ses relations avec les usagers ou ses collègues et qu’il n’est pas établi qu’ils auraient été connus en dehors du cadre privé.
Exécution du contrat de travail.
Cass., Soc., 6 mars 2024, n°22-19879.
Il résulte de l’article L. 1231-5 du code du travail que :
-lorsque la société mère ne réintègre pas le salarié après son licenciement par la filiale étrangère ;
– l’indemnité compensatrice de préavis, l’indemnité conventionnelle de licenciement, les salaires dus au titre de l’allocation de congé de reclassement et les dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse auxquels le salarié peut prétendre ;
– doivent être calculés par référence aux salaires perçus par celui-ci dans son dernier emploi, nonobstant les stipulations contractuelles et les dispositions de la convention collective applicable moins favorables que la règle légale.
Représentation des salariés – Unité économique et sociale.
Cass., Soc., 6 mars 2024, n° 22-13672.
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Il résulte des articles L. 2313-8 et L. 2313-9 du code du travail que l’accord collectif portant reconnaissance d’une unité économique et sociale dont l’objet est essentiellement de mettre en place un CSE selon les règles de droit commun prévues par le code du travail ne constitue :
– ni un accord interentreprises qui permet la mise en place, dans les conditions prévues par l’article L. 2313-9 du code du travail, d’un CSE spécifique entre des entreprises d’un même site ou d’une même zone et dont les attributions seront définies par l’accord interentreprises ;
– ni un accord interentreprises permettant de définir les garanties sociales des salariés de ces entreprises dans les conditions prévues par les articles L. 2232-36 à L. 2232-38 du code du travail.
La Cour de cassation juge :
– qu’une unité économique et sociale ne pouvant être reconnue qu’entre des entités juridiques distinctes prises dans l’ensemble de leurs établissements et de leur personnel ;
– toutes les organisations syndicales représentatives présentes dans ces entités doivent être invitées à la négociation portant sur la reconnaissance entre elles d’une unité économique et sociale (Soc., 10 novembre 2010, n° 09-60451).
Elle juge également que la reconnaissance ou la modification conventionnelle d’une unité économique et sociale ne relève pas du protocole d’accord préélectoral mais de l’accord collectif signé, aux conditions de droit commun, par les syndicats représentatifs au sein des entités faisant partie de cette unité économique et sociale (Soc., 14 novembre 2013, n° 13-12.712).
En conséquence, doit être censuré l’arrêt :
– qui déboute un syndicat représentatif dans une des entités appelées à composer l’unité économique et sociale envisagée, de sa demande d’enjoindre à une société, agissant pour le compte de l’unité économique et sociale, de l’inviter à la négociation de l’accord portant révision de l’unité économique et sociale ;
– aux motifs que ce syndicat n’avait pas franchi aux dernières élections professionnelles le seuil de 10 % des suffrages exprimés à l’échelle de l’ensemble des entreprises concernées par l’accord envisagé, alors que les articles L. 2232-36 à L. 2232-38 du code du travail n’étaient pas applicables.
Prud’hommes – Demandes liées au contrat de travail.
Cass., Soc., 6 mars 2024, n° 19-20538.
Source
Il résulte :
– des articles 33 et 36 du règlement (CE) n° 44/2001 du Conseil du 22 décembre 2000 concernant la compétence judiciaire, la reconnaissance et l’exécution des décisions en matière civile et commerciale, de l’article R. 1452-6 du code du travail (rédaction antérieure décret n° 2016-660 du 20 mai 2016), et de la jurisprudence de la Cour de justice de l’Union européenne (CJUE, 8 juin 2023, BNP Paribas, C-567/21) ;
– que, pour les instances introduites devant les conseils de prud’hommes antérieurement au 1er août 2016, période durant laquelle l’article R. 1452-6 susvisé du code du travail était applicable, lorsqu’une décision d’une juridiction d’un Etat membre est reconnue en France en application des articles 33 et 36 du règlement n°44/2001 ;
– sont irrecevables des demandes liées au contrat de travail entre les mêmes parties formées dans une nouvelle procédure devant la juridiction prud’homale dès lors que leur fondement est né avant la clôture des débats de l’instance antérieure devant la juridiction étrangère.