05 Oct Droit du travail – octobre 2023
Statut collectif et indemnité de repas.
Cass., Soc., 27 septembre 2023, n°21-23558.
Source
Les dispositions de la convention collective nationale des transports routiers et activités auxiliaires du transport du 21 décembre 1950 relatives aux conditions d’attribution de l’indemnité de repas unique ne sont applicables :
– qu’aux salariés contraints, du fait d’un déplacement ;
– de prendre un repas hors de leur domicile ou de leur lieu de travail.
Durée hebdomadaire et travail de nuit.
Cass., Soc., 27 septembre 2023, n° 21-24782.
Source
Le dépassement de la durée hebdomadaire maximale de travail du travailleur de nuit calculée sur une période quelconque de douze semaines consécutives ouvre, à lui seul, droit à la réparation.
Viole l’article 1315, devenu 1353, du code civil, la cour d’appel qui déboute le salarié de sa demande en paiement de dommages-intérêts pour non-respect de cette durée maximale de travail, sans constater que l’employeur justifiait l’avoir respectée.
Statut collectif du travail et congés.
Cass., Soc., 27 septembre 2023, n° 21-19483.
Source
L’article 25 de la convention collective nationale dite SYNTEC, du 15 décembre 1987 (rédaction antérieure avenant n° 46 du 16 juillet 2021) relatif à la période de congés, n’impose à l’employeur de consulter le comité d’entreprise ou, à défaut, les délégués du personnel, qu’au sujet de l’alternative ouverte à l’employeur entre la fermeture totale de l’entreprise dans une période située entre le 1er mai et le 31 octobre et l’établissement des congés par roulement.
L’absence de consultation du comité d’entreprise ou, à défaut, des délégués du personnel, sur cette alternative étant sans incidence sur la fixation des dates individuelles de congés des salariés, ceux-ci ne peuvent s’en prévaloir.
Prud’hommes- Résiliation judiciaire du contrat de travail.
Cass., Soc., 27 septembre 2023, n°21-25973.
L’action en résiliation judiciaire du contrat de travail peut être introduite tant que ce contrat n’a pas été rompu, quelle que soit la date des faits invoqués au soutien de la demande.
Contrat de prestations de livraisons – Lien de subordination.
Cass., Soc., 27 septembre 2023, n° 20-22465.
Source
Le lien de subordination est caractérisé par l’exécution d’un travail sous l’autorité d’un employeur qui a le pouvoir de donner des ordres et des directives, d’en contrôler l’exécution et de sanctionner les manquements de son subordonné.
Peut constituer un indice de subordination le travail au sein d’un service organisé lorsque l’employeur en détermine unilatéralement les conditions d’exécution.
Ne donne pas de base légale à sa décision, l’arrêt qui écarte la demande de requalification d’un contrat de prestations de livraisons en contrat de travail, sans analyser concrètement les conditions effectives dans lesquelles le livreur exerçait son activité, telles que fixées par les stipulations contractuelles.
Contrat de mission et CDD.
Cass., Soc., 27 septembre 2023, n°21-21154.
Source
Selon le premier alinéa de l’article L.1251-36 du code du travail (rédaction antérieure ordonnance n° 2017-1387 du 22 septembre 2017) :
– à l’expiration d’un contrat de mission, il ne peut être recouru, pour pourvoir le poste du salarié dont le contrat a pris fin :
– ni à un contrat à durée déterminée ni à un contrat de mission ;
– avant l’expiration d’un délai de carence calculé en fonction de la durée du contrat de mission incluant, le cas échéant, son ou ses deux renouvellements.
ll résulte des articles L. 1251-40 et L. 1245-1 du même code (rédaction antérieure à l’ordonnance n° 2017-1387 du 22 septembre 2017) qu’aucune disposition ne prévoit :
– dans le cas de la succession d’un contrat de travail temporaire et d’un contrat de travail à durée déterminée au bénéfice de l’ancienne entreprise utilisatrice ;
– la sanction de la requalification en contrat de travail à durée indéterminée en cas de non-respect du délai de carence prévu par l’article L. 1251-36 précité.
Contrat de travail et départ à la retraite.
Cass., Soc., 27 septembre 2023, n° 21-14773.
Le départ à la retraite d’un salarié est un acte unilatéral par lequel celui-ci manifeste de façon claire et non équivoque sa volonté de mettre fin au contrat de travail.
Il en résulte que :
– lorsque le salarié notifie à l’entreprise utilisatrice, de façon claire et non équivoque, sa décision de prendre sa retraite avant le terme du contrat de mission ;
– la relation de travail requalifiée en contrat de travail à durée indéterminée prend fin au jour de la notification du départ volontaire à la retraite du salarié et non à raison d’un licenciement sans cause réelle et sérieuse.
Rupture du contrat de travail – Faute grave.
Cass., Soc., 27 septembre 2023, n° 21-22937.
Source
Aux termes de l’article L. 1225-4-1 du code du travail, aucun employeur ne peut rompre le contrat de travail d’un salarié pendant les dix semaines suivant la naissance de son enfant.
Toutefois, l’employeur peut rompre le contrat s’il justifie d’une faute grave de l’intéressé ou de son impossibilité de maintenir ce contrat pour un motif étranger à l’arrivée de l’enfant.
Justifie légalement sa décision la cour d’appel qui :
– après avoir relevé que les griefs énoncés dans la lettre de licenciement ne caractérisaient pas l’impossibilité de maintenir le contrat de travail ;
– déclare nul le licenciement du salarié intervenu pendant cette période.
Cessation d’activité et motif économique de licenciement.
Cass., Soc., 20 septembre 2023, n°22-13485.
Source
Il résulte de l’article L. 1233-3, 4°, du code du travail (rédaction issue loi n° 2016-1088 du 8 août 2016) que la cessation d’activité complète et définitive de l’entreprise constitue en soi un motif économique de licenciement.
Doit en conséquence être censuré l’arrêt qui, pour dire les licenciements dépourvus de motif économique, retient que la cessation d’activité n’était pas effective au moment du licenciement et qu’elle n’était pas complète au sein du groupe, alors :
– d’une part, que la seule circonstance qu’une autre entreprise du groupe ait poursuivi une activité de même nature ne faisait pas par elle-même obstacle à ce que la cessation d’activité de la société soit regardée comme totale et définitive ;
– et, d’autre part, qu’il résultait de ses constatations que la cessation d’activité de l’entreprise était irrémédiablement engagée lors du licenciement, le maintien d’une activité résiduelle jusqu’au 31 mars 2017, nécessaire à l’achèvement de l’exploitation de certains produits avant leur cession à cette autre entreprise du groupe, ne caractérisant pas une poursuite d’activité.
Elections professionnelles – Liste d’émargement.
Cass., Soc., 20 septembre 2023, n°22-21249.
S’il résulte des articles R. 2314-16 et R. 2314-17 du code du travail relatifs aux modalités du vote électronique :
– que la liste d’émargement n’est accessible qu’aux membres du bureau de vote et à des fins de contrôle du déroulement du scrutin, et qu’après la clôture du scrutin il appartient aux parties intéressées de demander au juge, en cas de contestation des élections, que les listes d’émargement soient tenues à sa disposition ;
– l’irrégularité résultant de la transmission directe par l’employeur, après la clôture du scrutin, de la liste d’émargement à la demande d’une partie intéressée, n’est pas susceptible d’entraîner en elle-même l’annulation des élections.
CSE et expert-comptable.
Cass., Soc., 20 septembre 2023, n° 21-25233.
Selon l’article L. 2312-22 du code du travail (rédaction ordonnance n° 2017-1386 du 22 septembre 2017) en l’absence d’accord prévu à l’article L. 2312-19, le CSE est consulté chaque année sur la situation économique et financière de l’entreprise dans les conditions définies au sous-paragraphe 2.
Cette consultation est conduite au niveau de l’entreprise, sauf si l’employeur en décide autrement et sous réserve de l’accord de groupe prévu à l’article L. 2312-20 du code du travail.
Aux termes de l’article L. 2315-88 du même code, le CSE peut décider de recourir à un expert-comptable en vue de la consultation sur la situation économique et financière de l’entreprise prévue au 2° de l’article L. 2312-17.
Viole ces textes le jugement :
– qui rejette la demande d’annulation de la délibération du comité social et économique d’établissement et de la désignation d’un expert ;
– alors qu’il résulte de ses constatations qu’aucun accord collectif d’entreprise ne prévoyait la consultation de ce comité et que l’employeur n’avait pas décidé de le consulter ;
– de sorte que la consultation récurrente sur la situation économique et financière de l’entreprise relevait du seul comité social et économique central et que le comité social et économique de l’établissement ne pouvait recourir à une expertise à ce titre.
Mi-temps thérapeutique et salaire.
Cass., Soc., 20 septembre 2023, n° 22-12293.
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Il résulte de la combinaison de l’article L. 1132-1 du code du travail et des articles L. 3322-1 et L. 3324-5 du même code (rédaction antérieure loi n° 2019-486 du 22 mai 2019) :
– que la période pendant laquelle un salarié, en raison de son état de santé, travaille selon un mi-temps thérapeutique ;
– doit être assimilée à une période de présence dans l’entreprise ;
– de sorte que le salaire à prendre en compte pour le calcul de l’assiette de la participation due à ce salarié est le salaire perçu avant le mi-temps thérapeutique et l’arrêt de travail pour maladie l’ayant, le cas échéant, précédé.
Autorisation administrative de licenciement et caractère réel et sérieux du licenciement.
Cass., Soc., 20 septembre 2023, n° 22-13494.
Source
Le juge judiciaire ne peut :
– sans violer le principe de séparation des pouvoirs, en l’état d’une autorisation administrative de licenciement devenue définitive ;
– apprécier le caractère réel et sérieux du motif de licenciement au regard de la cause économique.
Il peut seulement se prononcer :
– lorsqu’il en est saisi, sur la responsabilité de l’employeur et la demande du salarié en réparation des préjudices que lui aurait causés une faute de l’employeur à l’origine de la cessation d’activité ;
– y compris le préjudice résultant de la perte de son emploi.
Doit en conséquence être censuré l’arrêt qui :
– déclare le licenciement d’un salarié protégé sans cause réelle et sérieuse et lui alloue des dommages-intérêts à ce titre, ;
– alors que par une décision devenue définitive ce licenciement avait été autorisé par l’inspection du travail
Rupture du contrat de travail et dénonciation de faits.
Cass. 13 septembre 2023, n° 21-22301.
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Il résulte de l’article L. 1132-3-3 du code du travail (rédaction issue loi n° 2016-1691 du 9 décembre 2016) que le salarié :
– qui relate ou témoigne de faits constitutifs d’un délit ou d’un crime dont il aurait eu connaissance dans l’exercice de ses fonctions, ainsi que le prévoit l’alinéa premier de ce texte ;
– n’est pas soumis à l’exigence, prévue par le deuxième alinéa du même texte, d’agir de manière désintéressée au sens de l’article 6 de la loi n° 2016-1691 précitée ;
– et qu’il ne peut être licencié pour ce motif, sauf mauvaise foi, laquelle ne peut résulter que de la connaissance de la fausseté des faits qu’il dénonce et non de la seule circonstance que les faits dénoncés ne sont pas établis.
Droit à congés – Suspension du contrat de travail en cas de maladie, accident professionnel et congé parental d’éducation.
Cass., Soc., 13 septembre 2023, n° 22-17340, 2217638, 22-14043 et 22-11106.
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Par une série de décisions, la Chambre sociale écarte des dispositions du droit français non conformes au droit européen en matière de congés payés.
Ainsi :
– les salariés dont le contrat de travail est suspendu en raison d’une maladie d’origine professionnelle ou non professionnelle, continuent à acquérir des droits à congés payés durant cette période (arrêt n° 22-17340) ;
– l’acquisition de congés payés en raison d’une maladie ou d’un accident professionnel n’est pas limitée à un an (arrêt n° 22-17638) ;
– à l’issue d’un congé parental d’éducation, les congés payés précédemment acquis doivent être reportés (arrêt n° 22-14043).
– la prescription de ce droit ne court qu’une fois que l’employeur a mis le salarié en mesure d’exercer ses droits à congés payés (arrêt n° 22-11106).
Rupture du contrat de travail et congés payés.
Cass., Soc., 13 septembre 2023, n°22-10529.
Source
La rémunération à prendre en considération pour le calcul de l’indemnité de congé payé est :
– la rémunération totale du salarié ;
– incluant les primes et indemnités versées en complément du salaire si elles sont versées en contrepartie ou à l’occasion du travail.
Rupture du contrat de travail et reclassement.
Cass., Soc., 13 septembre 2023, n° 22-12970.
Source
Selon l’article L. 1226-2-1 du code du travail (rédaction loi n° 2016-1088 du 8 août 2016), l’employeur ne peut rompre le contrat de travail que s’il justifie :
– soit de son impossibilité de proposer un emploi dans les conditions prévues à l’article L. 1226-2 ;
– soit du refus par le salarié de l’emploi proposé dans ces conditions ;
– soit de la mention expresse dans l’avis du médecin du travail que tout maintien du salarié dans un emploi serait gravement préjudiciable à sa santé ou que l’état de santé du salarié fait obstacle à tout reclassement dans un emploi.
Il s’ensuit que :
– lorsque l’avis d’inaptitude du médecin du travail mentionne que tout maintien du salarié dans un emploi dans cette entreprise serait gravement préjudiciable à sa santé et non pas que tout maintien dans un emploi serait gravement préjudiciable à santé ;
– l’employeur n’est pas dispensé de son obligation de procéder à des recherches de reclassement.
Entretien préalable de licenciement et délai.
Cass., Soc., 6 septembre 2023, n° 22-11661.
Source
Selon l’article L.1232-2 du code du travail, l’entretien préalable ne peut avoir lieu moins de cinq jours ouvrables après la présentation de la lettre recommandée ou de la remise en main propre de la lettre de convocation.
Doit en conséquence être censuré l’arrêt :
– qui condamne l’employeur au paiement d’une somme à titre de dommages-intérêts pour procédure irrégulière aux motifs que la lettre recommandée de convocation à l’entretien préalable avait été retirée par la salariée moins de cinq jours ouvrables avant l’entretien ;
– alors que le délai avait commencé à courir le jour suivant la présentation de la lettre recommandée au domicile de la salariée absente ;
– ce dont il résultait qu’à la date de l’entretien préalable, elle avait bénéficié d’un délai de cinq jours ouvrables.
Exécution du contrat de travail et dispositif de contrôle de l’activité des salariés.
Cass., Soc., 6 septembre 2023, n° 22-13783.
Source
Il résulte de l’article L. 1222-3 du code du travail :
– que si l’employeur a le droit de contrôler et de surveiller l’activité de ses salariés pendant le temps de travail ;
– il ne peut mettre en œuvre un dispositif de contrôle qui n’a pas été porté préalablement à leur connaissance.
Doit être approuvé l’arrêt qui :
– après avoir constaté que le salarié avait été préalablement informé de la mise en œuvre au sein de l’entreprise d’un dispositif dit du « client mystère » permettant l’évaluation professionnelle et le contrôle de l’activité des salariés ;
– en déduit la licéité des éléments de preuve issus de l’intervention d’un client mystère, produits par l’employeur pour établir la matérialité des faits invoqués à l’appui du licenciement disciplinaire.
Travail dissimulé et sous-traitance.
Cass., Crim., 5 septembre 2023, n°22-84400.
Source
L’infraction prévue à l’article L. 8271-1-1 du code du travail de recours à la sous-traitance, par un entrepreneur :
– sans faire accepter le sous-traitant et agréer ses conditions de paiement par le maître de l’ouvrage, en violation des dispositions du premier alinéa de l’article 3 de la loi n° 75-1334 du 31 décembre 1975 relative à la sous-traitance ;
– ne peut être caractérisée en présence d’une situation de sous-traitance fictive.
Encourt la cassation l’arrêt qui déclare les prévenus coupables de ce délit :
– tout en retenant leur culpabilité des chefs de travail dissimulé, prêt illicite de main-d’œuvre et marchandage ;
– après avoir relevé que les personnes contrôlées en situation de travail étaient en réalité toutes employées par la société prévenue.
Vol commis par un salarié et circonstance aggravante de ruse.
Cass., Crim., 5 septembre 2023, n°22-86256.
Source
L’utilisation par un salarié d’un code :
– qui ne lui a été remis qu’à des fins professionnelles, pour s’introduire dans les locaux où est commis le vol ;
– caractérise la circonstance aggravante de ruse, au sens de l’article 311-5, 3°, du code pénal.