08 Déc NEWSLETTER – DECEMBRE 2015
Droit du travail et sécurité sociale
- Licenciement – Lieu de travail. Cass., Ass.Plén., 23 octobre 2015, N°13-25279.
Mmes X… et A… ainsi que M. Z…, salariés de la société Carte et services devenue Afone monétics (l’employeur), employés au sein de l’établissement de Rungis conformément aux stipulations de leur contrat de travail, ont été informés le 13 février 2007 qu’un projet de restructuration interne entraînerait leur mutation dans des locaux sis 14 rue Lincoln à Paris (8e) à compter du 19 mars 2007. Les salariés ont refusé de rejoindre ce nouveau lieu de travail, estimant qu’il s’agissait d’une modification d’un élément essentiel de leur contrat de travail qui ne pouvait leur être imposée sans leur accord. Ayant été licenciés pour faute grave le 1er juin 2007 pour avoir refusé de se présenter à leur nouveau poste à Paris et persisté à se présenter au siège de Rungis, ils ont saisi la juridiction prud’homale pour contester le bien-fondé du licenciement.
Selon l’article 3 de l’avenant ” Mensuels ” du 2 mai 1979 à la convention collective régionale des industries métallurgiques, mécaniques et connexes de la région parisienne, que toute modification de caractère individuel apportée à l’établissement dans lequel l’emploi est exercé doit faire préalablement l’objet d’une notification écrite, et que, dans le cas où cette modification ne serait pas acceptée par le salarié, elle serait considérée comme une rupture de contrat de travail du fait de l’employeur et réglée comme telle. La cour d’appel a exactement énoncé que ces dispositions conventionnelles ne confèrent pas au lieu de travail un caractère contractuel et signifient seulement qu’en cas de non-acceptation par le salarié de la modification envisagée du lieu de travail, l’employeur qui n’entend pas renoncer à la modification doit prendre l’initiative de la rupture du contrat de travail en engageant une procédure de licenciement.
Ayant constaté que, malgré le respect par l’employeur d’un délai de prévenance suffisant pour permettre aux salariés, liés par une clause de mobilité, de s’organiser, ces derniers avaient persisté dans une attitude d’obstruction consistant à se présenter jusqu’au mois de mai 2007, de manière systématique, sur leur ancien lieu de travail de Rungis, la cour d’appel a pu décider qu’un tel refus, pour la justification duquel aucune raison légitime n’était avancée, caractérisait une faute grave rendant impossible la poursuite de leur relation contractuelle de travail.
A la suite d’une restructuration consistant à transférer une partie de ses salariés du site de Rungis à Paris intra muros, une société a licencié pour faute grave trois salariés qui refusaient de rejoindre leur nouveau lieu de travail, soutenant que l’article 3 de l’avenant “Mensuels” à la convention collective régionale des industries métallurgiques, mécaniques et connexes de la région parisienne, étendu par arrêté du 10 décembre 1979 interdisait à l’employeur de leur imposer un changement de leur lieu de travail. Ces trois salariés ont formé un premier pourvoi contre l’arrêt de la cour d’appel de Paris confirmant, le 4 mai 2011, la décision des premiers juges les ayant débouté de leurs demandes en paiement contre l’employeur pour licenciement sans cause réelle et sérieuse. La Chambre sociale de la Cour de cassation a, par arrêt du 26 septembre 2012, cassé cet arrêt pour violation des articles 3 de l’avenant “Mensuels” et L. 2254-1 du code du travail, ensemble l’article 1134 du code civil, jugeant que le premier de ce texte donnait au lieu de travail un caractère contractuel de sorte qu’il ne pouvait pas être modifié sans l’accord du salarié. La cour de renvoi a alors confirmé le jugement du conseil de prud’hommes. La Chambre sociale, par arrêt du 11 mars 2015, a renvoyé l’affaire devant l’Assemblée plénière. Celle-ci vient d’approuver la cour d’appel de renvoi d’avoir interprété les dispositions conventionnelles en ce qu’elles ne confèrent pas au lieu de travail un caractère contractuel mais signifient seulement qu’en cas de non-acceptation par le salarié de la modification envisagée du lieu de travail, l’employeur qui n’entend pas renoncer à la modification doit prendre l’initiative de la rupture du contrat de travail en engageant une procédure de licenciement.
- Licenciement – Faute lourde. Cass. Soc., 22 octobre 2015, N°14-11801.
- X…, engagé par l’association Accueil aux personnes âgées, le 20 décembre 2010, en qualité de directeur d’établissement, a été licencié pour faute lourde par lettre du 11 janvier 2011.
Pour décider que le licenciement repose sur une faute lourde et limiter la condamnation de l’employeur à payer au salarié une certaine somme à titre d’indemnité de congés payés, l’arrêt, après avoir constaté que celui-ci s’est fait octroyer une augmentation de sa rémunération de sujétion spéciale et de son coefficient ainsi qu’une prime exceptionnelle de 3 000 euros, qu’il s’est accordé des acomptes sur salaires de 15 000 euros sans prévoir les modalités de remboursement, qu’il a fait bénéficier d’avantages anormaux deux salariés, dont sa soeur qu’il avait engagée, retient que de telles dérives financières tant en sa faveur qu’au profit de proches, qui ont préjudicié gravement à l’association sur le plan financier, et l’obtention a posteriori de la garantie du président les 10 et 29 novembre 2010 alors que l’alerte écrite de l’expert-comptable est du 22 novembre 2010, caractérisent une intention de nuire du salarié.
La faute lourde est caractérisée par l’intention de nuire à l’employeur, laquelle implique la volonté du salarié de lui porter préjudice dans la commission du fait fautif et ne résulte pas de la seule commission d’un acte préjudiciable à l’entreprise.
En se déterminant comme elle l’a fait, sans caractériser la volonté de nuire du salarié, la cour d’appel n’a pas donné de base légale à sa décision au regard de l’article L. 3141-26 du code du travail.
- Licenciement – Faute lourde. Cass. Soc., 22 octobre 2015, N°14-11291.
- X…, engagé le 2 janvier 2006 par la société H. Y… et fils en qualité d’assistant export, a travaillé dans le cadre d’un contrat de travail à durée indéterminée en qualité de responsable import export. Il a été licencié, le 11 mars 2009, pour faute lourde.
Pour dire le licenciement justifié par une faute lourde et rejeter les demandes du salarié au titre de la rupture de son contrat de travail, l’arrêt retient que celui-ci a détourné sur son compte personnel une somme de 60 000 euros venant en règlement partiel, par un client, d’une facture correspondant à la livraison d’une commande de vins, qu’il a reconnu avoir sollicité cette somme auprès du client et l’avoir perçue et ne démontre pas qu’il s’agissait d’un prêt personnel ni en avoir informé l’employeur, qu’il n’apporte aucune preuve contraire de ce qui constitue un abus de confiance au préjudice de son employeur et une tentative d’enrichissement personnel au détriment de la société, qu’il a manifestement commis une faute grave avec intention de nuire à son employeur.
La faute lourde est caractérisée par l’intention de nuire à l’employeur, laquelle implique la volonté du salarié de lui porter préjudice dans la commission du fait fautif et ne résulte pas de la seule commission d’un acte préjudiciable à l’entreprise.
En se déterminant comme elle l’a fait, sans caractériser la volonté de nuire du salarié, la cour d’appel n’a pas donné de base légale à sa décision au regard de l’article L. 3141-26 du code du travail.
- Licenciement – Lettre de rupture. Cass. Soc., 20 octobre 2015, N°14-23712.
- X… a été engagé par la société Canal + le 13 novembre 1995 par contrat à durée déterminée, puis par la société NPA production (la société NPA), société du groupe Canal +, à compter du 2 juillet 1998 en qualité d’imitateur dans le cadre du programme « Les Guignols de l’Info », diffusé en direct à l’exception de certains sketches pré-enregistrés.
Les contrats de travail à durée déterminée, dénommés « lettre d’engagement » se sont succédé mensuellement jusqu’au 19 septembre 2011, dernier jour travaillé. Le salarié a saisi la juridiction prud’homale aux fins de voir requalifier les contrats en contrat de travail à durée indéterminée et condamner l’employeur à lui payer diverses sommes au titre de la requalification et de la rupture.
La société NPA fait grief à l’arrêt de requalifier la relation de travail en contrat à durée indéterminée à compter du 2 juillet 1998 et de la condamner à payer diverses sommes à titre d’indemnité de requalification, et pour défaut d’information sur le droit individuel à la formation alors, selon le moyen, que la succession de contrats à durée déterminée dits « d’usage » doit être justifiée par des raisons objectives qui s’entendent de l’existence d’éléments concrets établissant le caractère par nature temporaire de l’emploi.
En l’espèce, pour considérer que de tels contrats n’auraient pu être conclus avec M. X…, la cour d’appel a retenu que, compte tenu des contrats signés entre l’exposante et Canal +, la première se trouverait « dans une situation d’incertitude moins importante (la saison) que M. X… (le mois) », que l’émission dans laquelle intervenait M. X… était diffusée depuis plus de vingt ans à la même heure, et qu’il y avait exercé les mêmes fonctions pendant seize ans.
En statuant ainsi, par des motifs inopérants, sans examiner si, comme le faisait valoir l’exposante, le caractère par nature temporaire de l’emploi occupé par M. X… (imitateur) ne résultait pas de ce qu’il exerçait des fonctions exclusivement artistiques et non techniques, n’était lié par aucune clause d’exclusivité, et intervenait dans le cadre concept audiovisuel unique pour le compte d’une société de production dont l’activité normale et permanente ne consiste pas à employer des imitateurs, la cour d’appel a privé sa décision de base légale au regard des articles L. 1242-1, L. 1242-2, L. 1245-1, et D. 1242-1 du code du travail, ensemble des clauses 1 et 5 de l’accord-cadre sur le travail à durée déterminée conclu le 18 mars 1999 et mis en oeuvre par la directive 1999/70/CE du 28 juin 1999.
La cour d’appel qui, usant de son pouvoir souverain d’appréciation, a constaté que le caractère temporaire de l’emploi du salarié n’était pas établi et que l’intéressé avait, suivant la répétition durant seize ans de lettres d’engagement mensuelles, exercé les mêmes fonctions d’imitateur dans le cadre du même programme télévisuel a, par ces seuls motifs, légalement justifié sa décision.
La cour d’appel, qui n’était pas tenue d’entrer dans le détail de l’argumentation des parties ni d’effectuer une recherche qui ne lui était pas demandée, n’a pas modifié l’objet du litige dès lors que la société NPA avait conclu devant elle à ce que le salarié soit débouté de sa demande de rappel de salaire et ne pouvait dès lors être considérée comme la reconnaissant fondée.
Le juge qui requalifie la relation contractuelle en un contrat de travail à durée indéterminée doit rechercher si la lettre de rupture des relations contractuelles vaut lettre de licenciement et si les motifs de rupture énoncés constituent des griefs matériellement vérifiables permettant de décider si le licenciement a une cause réelle et sérieuse.
Pour condamner la société NPA à payer des sommes à titre de dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, à titre d’indemnité compensatrice de préavis, au titre des congés payés afférents, et à titre d’indemnité de licenciement, l’arrêt retient qu’eu égard à la requalification du contrat en contrat à durée indéterminée, sa rupture s’analyse en un licenciement sans cause réelle et sérieuse, sans qu’il soit nécessaire de statuer sur les motifs énoncés par Mme Y…, DRH du groupe Canal + dans son courriel du 20 septembre 2011 par lequel elle a notifié au salarié la fin de la relation de travail.
En statuant ainsi, et alors que le salarié ne contestait pas avoir pris connaissance de ce courriel, la cour d’appel a violé l’article L. 1232-6 du code du travail.
- Arrêt maladie – Caisse du régime général des salariés. Cass. Soc., 20 octobre 2015, N°14-16503.
- X… a été engagé le 17 octobre 1994 par l’association Mission locale de Lyon en qualité de conseiller.
Ayant bénéficié d’un congé pour création d’entreprise jusqu’au 18 avril 2009, il a retrouvé son emploi à compter de cette date.
Il a été placé en arrêt de travail pour maladie à compter du 19 avril 2009 et a perçu jusqu’au 23 novembre 2009 des indemnités journalières versées par le régime social des indépendants auquel il était affilié en raison de son activité commerciale.
L’employeur a saisi la juridiction prud’homale d’une demande de remboursement des salaires versés pendant l’arrêt maladie.
L’article 5.9 de la convention collective nationale des missions locales et PAIO du 21 février 2001 prévoit, sous conditions d’une durée de présence dans l’entreprise et d’une indemnisation par la sécurité sociale, le bénéfice pour le salarié en arrêt maladie du maintien du salaire net sous réserve de la signature par ce salarié de tous documents nécessaires à l’employeur pour le remboursement par la sécurité sociale des indemnités journalières.
La cour d’appel a exactement retenu que ces dispositions ne visaient que les indemnités versées, non par le régime social des indépendants, mais par une caisse du régime général des salariés.
- Licenciement – Cause inhérente à la personne du salarié. Cass. Soc., 20 octobre 2015, N°14-17624.
- X…, engagé par contrat du 1er janvier 1996 par la société SOF GAC, devenue la société Dentsply Gac Europe en qualité de VRP exclusif, a été licencié le 2 novembre 2011.
Pour débouter le salarié de sa demande d’annulation d’un avertissement sanctionnant le fait d’avoir passé entre le 2 et le 5 septembre 2011 trois commandes portant sur des produits d’importation japonaise, ce en violation de la politique de contingentement mise en place par l’employeur à la suite de la catastrophe de Fukushima, l’arrêt retient, la matérialité du grief n’étant pas contestée, que le salarié devait conformément aux consignes claires et strictes qu’il avait reçues notamment par courriel du 14 mars 2011, indiquer aux clients que les produits étaient disponibles en quantité limitée et devait vérifier si le stock permettait de répondre aux commandes.
En statuant ainsi, sans répondre aux conclusions du salarié qui faisait valoir que par un courriel du 6 juin 2011, l’employeur avait indiqué qu’il n’y avait pas lieu de tenir compte du contingentement sur certains produits qui étaient précisément ceux vendus par le salarié, la cour d’appel n’a pas satisfait aux exigences de l’article 455 du code de procédure civile.
Un licenciement pour une cause inhérente à la personne du salarié doit être fondé sur des éléments objectifs et imputables au salarié.
Pour débouter le salarié de sa demande d’indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, l’arrêt retient que les allégations contenues dans un courrier du 22 août 2011 rédigé par le conseil du salarié accusant l’employeur d’une part, d’appliquer à son égard une politique de contingentement discriminatoire dont la cour n’a pas constaté la réalité, d’autre part, de vouloir lui retirer son statut de VRP alors que tel n’était plus le cas, et prétendant sans fondement, que les produits de substitution n’étaient pas commercialisables tout en menaçant l’employeur de saisir le conseil de prud’hommes aux fins de la résiliation judiciaire du contrat de travail, caractérisent une hostilité marquée à la stratégie de l’entreprise de nature à entraîner une perte de confiance dans un contexte de crise majeure et démontrent l’intention du salarié d’aller jusqu’à la rupture du contrat de travail sans, toutefois, prendre l’initiative d’une prise d’acte.
En statuant ainsi, en se fondant sur le seul contenu d’une lettre rédigée et signée par le conseil du salarié, la cour d’appel a violé l’article L. 1232-1 du code du travail.
- Rupture du contrat de travail – Retraite du salarié. Cass. Soc., 20 octobre 2015, N°14-17473.
- X… a été engagé par la société Kaufman et Broad, le 2 mai 2001, en qualité d’attaché commercial au sein de l’agence de Marseille, chargée de la vente de lots immobiliers dont la construction était mise en œuvre par la société.
Sa rémunération comprenait une partie fixe et des commissions sur les ventes menées à terme. Il a saisi la juridiction prud’homale pour obtenir la résiliation judiciaire de son contrat de travail ainsi que le paiement de rappels de commissions.
Après avoir obtenu, par jugement du 18 avril 2012, la résiliation judiciaire du contrat aux torts de l’employeur, il a, au cours de la procédure d’appel, pris sa retraite le 1er juillet 2012 et demandé la requalification de son départ à la retraite en prise d’acte de la rupture de son contrat de travail.
Pour rejeter la demande du salarié en requalification de son départ en retraite en une prise d’acte aux torts de l’employeur, l’arrêt retient que le départ à la retraite de M. X…, le 1er juillet 2012, alors qu’il avait obtenu la résiliation judiciaire de son contrat de travail par jugement du 18 avril 2012, n’était motivé que par son souhait de bénéficier d’une pension de retraite.
Dans ses conclusions reçues à la cour le 16 juillet 2013, il faisait toujours référence à la résiliation judiciaire de son contrat produisant les effets d’un licenciement sans cause réelle et sérieuse et n’a modifié son argumentation, faisant valoir que son départ en retraite constituait en réalité une prise d’acte en raison des manquements précédemment invoqués au soutien de sa demande de résiliation, qu’en novembre 2013.
Le départ à la retraite du salarié est un acte unilatéral par lequel le salarié manifeste de façon claire et non équivoque sa volonté de mettre fin au contrat de travail.
Lorsque le salarié, sans invoquer un vice du consentement de nature à entraîner l’annulation de son départ à la retraite, remet en cause celui-ci en raison de faits ou manquements imputables à son employeur, le juge doit, s’il résulte de circonstances antérieures ou contemporaines de son départ qu’à la date à laquelle il a été décidé, celui-ci était équivoque, l’analyser en une prise d’acte de la rupture qui produit les effets d’un licenciement sans cause réelle et sérieuse si les faits invoqués la justifiaient ou dans le cas contraire d’un départ volontaire à la retraite.
En statuant comme elle l’a fait, alors qu’elle avait constaté que le salarié avait, préalablement à son départ en retraite, saisi la juridiction prud’homale pour obtenir la résiliation judiciaire de son contrat de travail en invoquant divers manquements imputables à son employeur, ce dont il résultait l’existence d’un différend rendant le départ en retraite équivoque, la cour d’appel qui devait l’analyser en une prise d’acte et rechercher si les manquements de l’employeur étaient suffisamment graves pour empêcher la poursuite du contrat de travail, a violé les articles L. 1231-1 et L. 1237-9 du code du travail.
Lorsque le calcul de la rémunération dépend d’éléments détenus par l’employeur, celui-ci est tenu de les produire en vue d’une discussion contradictoire.
Pour débouter le salarié de sa demande en paiement d’un rappel de commissions pour les ventes réalisées sur le secteur de Montpellier au cours de l’année 2008, l’arrêt énonce que le salarié ne fournit aucune précision sur les ventes en question pour permettre de vérifier le bien-fondé et le calcul de la demande.
En statuant ainsi, alors qu’il appartenait à l’employeur de justifier des ventes menées à terme sur le secteur d’activité du salarié pendant la période sur laquelle portait la réclamation, la cour d’appel a violé l’article 1315 du code civil.
- Fonds de commerce – Absence de contrat de travail. Cass., Soc., 14 octobre 2015, N°14-10960.
La société en nom collectif HKM (SNC HKM) exploitant un fonds de commerce de « café bar restaurant brasserie » à Paris a été constituée le 26 mars 2009 entre M. X…, Mme Y… et M. Z…
- Z… tenait l’établissement une partie du temps et logeait dans l’appartement situé à l’étage. Se prévalant d’un contrat de travail, il a saisi la juridiction prud’homale de demandes de rappels de salaires et d’indemnités pour rupture abusive.
La cour d’appel, qui a retenu que M. Z… était associé de la SNC HKM, et à ce titre, en vertu de l’article L. 221, alinéa 1, du code de commerce, commerçant répondant indéfiniment et solidairement des dettes sociales, en a exactement déduit que cette situation excluait qu’il puisse être lié à cette société par un contrat de travail.
- Représentant du personnel – Statut. Cass., Soc., 14 octobre 2015, N°14-12193.
- X… a été engagé le 20 mars 1981 par l’association Aurore en qualité d’infirmier de nuit dans un centre médical.
Il a été élu membre du comité d’entreprise en 2004 et délégué du personnel en avril 2007.
Le 7 juin 2005, il a saisi la juridiction prud’homale notamment de demandes en paiement d’heures supplémentaires, de repos compensateurs, de primes et d’heures de délégation. Alors que la procédure était en cours, il a pris acte de la rupture de son contrat par lettre du 27 août 2007.
La cour d’appel qui a constaté que depuis 2004 et malgré les réclamations réitérées du salarié et la saisine de la juridiction prud’homale en 2005, l’employeur n’avait rémunéré ni les heures complémentaires et supplémentaires effectuées par le salarié, ni ses heures de délégation, sans autre justification, s’agissant des heures supplémentaires, que les modifications successives de la législation relative au temps de travail, a pu en déduire que ces manquements de l’employeur à ses obligations, empêchaient la poursuite du contrat de travail.
La dissimulation d’emploi salarié prévue par l’article L. 8221-5 du code du travail n’est caractérisée que s’il est établi que l’employeur a, de manière intentionnelle, mentionné sur le bulletin de paie un nombre d’heures de travail inférieur à celui réellement effectué. Les juges du fond apprécient souverainement l’existence d’une telle intention.
Pour condamner l’employeur à payer au salarié une indemnité pour violation du statut protecteur correspondant à 49 mois et trois semaines de salaire mensuel brut, l’arrêt retient que le salarié dont le mandat de délégué du personnel a été renouvelé en avril 2007 pour une durée de quatre ans, est fondé à solliciter une telle indemnité d’un montant correspondant à la période de protection restant à courir à compter de la rupture jusqu’au mois d’octobre 2011, soit six mois après l’expiration de son mandat.
Le délégué du personnel qui ne demande pas la poursuite du contrat de travail illégalement rompu a droit à une indemnité pour violation du statut protecteur égale à la rémunération qu’il aurait perçue depuis son éviction jusqu’à l’expiration de la période de protection, dans la limite de deux ans, durée minimale légale de son mandat, augmentée de six mois.
En statuant comme elle a fait, la cour d’appel a violé les articles L. 2411-5 et L. 2314-27 du code du travail.
Pour débouter le salarié de sa demande de rappel de salaire au titre du temps de pause et des congés payés afférents, l’arrêt retient, par motifs propres et adoptés, que l’employeur justifie par les attestations versées aux débats que les infirmiers de nuit, bénéficiant d’une chambre de garde équipée d’un lit avec draps, couvertures et oreillers et d’un espace toilette, ainsi que d’un plateau repas et petit déjeuner, et par ailleurs affectés dans un établissement réservé à des personnes ayant une activité extérieure dont les nuits étaient en principe consacrées au repos, pouvaient prendre leur pause, et qu’il apparaît, au vu du projet d’établissement que le salarié verse lui-même aux débats que « les infirmiers de nuit sont quatre », de sorte que chacun avait la possibilité de bénéficier d’une pause de 20 minutes, que l’intéressé ne justifie pas ne pas avoir pu prendre ses pauses et avoir été dans l’obligation de rester en permanence à disposition de l’employeur.
En se déterminant ainsi, sans rechercher si, pendant le temps de pause, le salarié pouvait effectivement vaquer à des occupations personnelles, ou s’il devait rester à la disposition de l’employeur afin d’assurer la continuité du service, la cour d’appel a privé sa décision de base légale au regard des articles L. 3121-1 et L. 3121-2 L. 3121-33 du code du travail.
- Licenciement pour motif économique – Etablissement public administratif d’enseignement et de formation professionnelle. Cass., Soc., 14 octobre 2015, N°14-14196.
- X…, engagé à compter du 10 avril 1995, dans le cadre d’un contrat de droit privé par l’Etablissement public local d’enseignement et de formation professionnelle agricole (EPLEFPA) de Kernilien, a été élu, en septembre 2009, représentant des salariés au conseil d’exploitation et au conseil d’administration de cet établissement public administratif.
Licencié pour motif économique par lettre du 21 janvier 2010, il a saisi la juridiction prud’homale pour obtenir la nullité de son licenciement et le paiement de diverses sommes, en soutenant que la rupture de son contrat de travail impliquait l’application du régime réservé aux salariés protégés et l’autorisation préalable de l’inspecteur du travail.
Il résulte des dispositions de l’article L. 2311-1 du code du travail entré en vigueur le 1er mai 2008, que ni l’absence d’intervention réglementaire pour organiser les modalités d’adaptation du code du travail à la situation particulière de ce type d’établissement public administratif, ni l’éventuelle carence de l’employeur dans la mise en place des institutions représentatives du personnel de droit privé, ne sauraient avoir pour effet d’étendre au mandat du représentant des salariés au conseil d’administration d’un établissement public administratif d’enseignement et de formation professionnelle, la protection prévue par l’article L. 2411-5 du code du travail au bénéfice des délégués du personnel.
A défaut de texte particulier prévoyant d’accorder au représentant des salariés au conseil d’administration de ce type d’établissement, la protection prévue pour les délégués du personnel, c’est à juste titre que la cour d’appel a considéré que le licenciement de l’intéressé n’était pas subordonné à l’autorisation de l’inspecteur du travail.
- Comité d’hygiène, de sécurité et des conditions de travail – Expertise. Cass., Soc., 14 octobre 2015, N°14-17224.
La société Faurecia intérieur industrie (FII) fait partie du groupe Faurecia, qui constitue la division équipement automobile du groupe PSA Peugeot-Citroën, lequel déploie son activité dans le secteur automobile avec Peugeot Citroën automobiles, le secteur équipement automobile avec Faurecia, le secteur financier avec PSA finance, chacune de ces entités disposant de comités d’établissement et d’un comité central d’entreprise propres.
En juillet 2012, la société Peugeot Citroën automobiles, faisant état de pertes importantes, a engagé un projet de réorganisation de ses activités et de réduction des effectifs consistant notamment en la fermeture de son site d’Aulnay-sous-Bois.
Par délibération du 9 janvier 2013, le comité d’hygiène, de sécurité et des conditions de travail (CHSCT) de l’établissement d’Auchel de la société FII a décidé de recourir à l’expertise prévue à l’article L. 4614-12 du code du travail.
Ayant retenu que, pour établir l’existence d’un projet de réorganisation contesté par l’employeur, le CHSCT se bornait à invoquer une baisse significative du chiffre d’affaires de l’établissement d’Auchel et la disparition de certaines productions attribuées à ce site, que cette situation était le résultat prévisible de la fin de certains marchés à quoi s’ajoutaient les difficultés conjoncturelles affectant l’industrie automobile en Europe et notamment des marques françaises, que s’il avait existé un projet de redéploiement industriel de l’activité dans le bassin Nord en 2008, celui-ci avait suscité un important conflit social conclu par un protocole d’accord du 14 mai 2009, complété par un avenant du 14 mai 2010 aux termes duquel la société FII s’est engagée notamment à ne pas remettre en cause la vocation industrielle du site d’Auchel jusqu’à fin 2015, et à maintenir sur le site un effectif de cent trente salariés, la cour d’appel a pu en déduire que l’existence d’un projet important modifiant les conditions de santé et de sécurité ou les conditions de travail des salariés n’était pas avérée et a annulé à bon droit la délibération du CHSCT désignant un expert.
- Licenciement économique collectif – Critères d’ordre. Cass., Soc., 14 octobre 2015, N°14-14339.
La société Clear Channel France a initié en juillet 2005 une procédure de licenciement économique collectif avec la mise en place d’un plan de sauvegarde de l’emploi en mai 2006. Mme X…, candidate au départ volontaire, a été licenciée pour motif économique par lettre du 1er juin 2007 après autorisation de l’administration du travail en sa qualité de salariée protégée.
Un accord collectif conclu au niveau de l’entreprise peut prévoir un périmètre pour l’application des critères déterminant l’ordre des licenciements inférieur à celui de l’entreprise.
Il s’ensuit que la cour d’appel, qui a constaté que les critères d’ordre des licenciements avaient été mis en œuvre dans le périmètre géographique « de l’agence, du bureau ou du site technique, siège social, plate-forme technique », tel que prévu par un accord collectif signé le 26 avril 2006 par la société et sept organisations syndicales et approuvé par le comité d’entreprise, a, par ces seuls motifs, légalement justifié sa décision.
- Contrat de travail – Convention de rupture. Cass., Soc., 6 octobre 2015, N°14-17539.
Selon l’article L. 1237-13 du code du travail, le droit de rétractation dont dispose chacune des parties à la convention de rupture doit être exercé par l’envoi à l’autre partie d’une lettre adressée par tout moyen attestant de sa date de réception.
Il résulte des articles L. 1237-13 et L. 1237-14 du code du travail qu’en l’absence de rétractation de la convention de rupture, un salarié ne peut prendre acte de la rupture du contrat de travail, entre la date d’expiration du délai de rétractation et la date d’effet prévue de la rupture conventionnelle, que pour des manquements survenus ou dont il a eu connaissance au cours de cette période.
- Suspension du contrat de travail – Maladie professionnelle. Cass., Soc., 6 octobre 2015, N° 13-26052.
Engagé par le groupement d’intérêt économique (GIE) UFP le 1er février 1989 en qualité de comptable, M. X… a été désigné en qualité de délégué syndical le 30 octobre 1995.
Il a été en arrêt de travail pour maladie du 3 au 11 juin 1996, puis du 30 septembre 1996 au 29 janvier 1997 et enfin à compter du 22 avril 1997.
A compter du 1er juillet 2002, le salarié a été pris en charge par la caisse primaire d’assurance maladie au titre de la législation sur les maladies professionnelles et les accidents du travail et placé en invalidité deuxième catégorie le 9 septembre 2004.
Le médecin du travail ayant déclaré ce salarié inapte aux fonctions de comptable lors de la seconde visite le 20 mai 2008 et après autorisation de l’inspecteur du travail en date du 12 septembre 2008, le GIE UFP a notifié à M. X… son licenciement pour inaptitude et impossibilité de reclassement par une lettre du 16 septembre 2008.
Pour rejeter la demande de condamnation de l’employeur au paiement d’un complément d’indemnité de licenciement présentée par le salarié, l’arrêt retient que son contrat de travail ayant été suspendu en raison d’un arrêt pour maladie professionnelle du 1er juillet 2002 au 9 septembre 2004, date à laquelle, son état étant considéré comme consolidé, il a été placé en invalidité deuxième catégorie, le salarié calcule à tort l’indemnité de licenciement qui lui serait due sur la base de quatorze années d’ancienneté.
En statuant ainsi, alors qu’en l’absence de visite de reprise le contrat de travail du salarié, en arrêt de travail pour maladie professionnelle, reste suspendu en conséquence de cette maladie, nonobstant la reconnaissance de son invalidité par la caisse primaire d’assurance maladie, la cour d’appel a violé les articles L. 1226-7 et R. 4624-22 du code du travail.
Pour rejeter la demande de condamnation de l’employeur à payer au salarié une somme à titre de complément d’indemnité de congés payés, l’arrêt retient que le contrat de travail ayant été suspendu du 1er juillet 2002 au 9 septembre 2004 en raison de sa maladie professionnelle, soit pendant une durée ininterrompue supérieure à un an, l’intéressé ne peut bénéficier des dispositions de l’article L. 3141-5 du code du travail.
En statuant ainsi, alors que les périodes pendant lesquelles l’exécution du contrat de travail est suspendue pour cause de maladie professionnelle sont considérées comme périodes de travail effectif pour la détermination de la durée du congé, dans la limite d’un an, la cour d’appel a violé l’article L. 3141-5 du code du travail.
Droit des affaires, concurrence, distribution et consommation
- Bail commercial – Cession. Cass., Civ., 3ème, 22 octobre 2015, N°14-20096.
La société Enlux, titulaire d’un bail commercial portant sur des locaux appartenant à la SCI Capucine I, s’est engagée à le céder à la société Banque Chaix, sous diverses conditions suspensives dont la signature d’un nouveau bail commercial, devant être réalisées le 15 septembre 2012.
Des pourparlers entre la société propriétaire et la société Banque Chaix se sont prolongés au-delà de cette date. Invitée à signer l’acte de cession le 15 janvier 2013, la Banque Chaix ne s’est pas présentée en invoquant la caducité du compromis. La société Enlux l’a assignée aux fins de voir déclarer la vente parfaite et de la voir condamnée au paiement de diverses sommes.
Pour rejeter les demandes de la société Enlux, l’arrêt retient que le juge n’a pas le droit de modifier la loi des parties en appréciant la cohérence des contrats et en procédant à leur réfaction par des considérations propres et qu’il n’y a pas lieu de déclarer non écrite la clause subordonnant la cession de bail à la signature d’un nouveau bail.
En prévoyant que la clause qui prévoit une condition portant sur un élément essentiel à la formation du contrat doit être réputée non écrite, la cour d’appel l’article 1168 du code civil.
- Redressement judiciaire – Mandataire de justice. Cass., Com., 13 octobre 2015, N°14-14327.
Il résulte des articles L. 621-68 du code de commerce et 90 du décret du 27 décembre 1985 que les instances auxquelles le représentant des créanciers était partie et qui ont été reprises par le commissaire à l’exécution du plan doivent, lorsque celui-ci n’est plus en fonction, être poursuivies par un mandataire de justice spécialement désigné à cet effet. Il n’est pas fait exception à cette règle lorsque les débiteurs étaient eux-mêmes parties à l’instance.
- Caution solidaire – Procédure de conciliation. Cass., Com., 13 octobre 2015, N°14-19734.
Mme X… s’est, par acte sous seing privé du 23 février 2007, rendue caution solidaire envers la société Banque populaire Côte d’Azur (la banque) d’un prêt consenti par celle-ci à la société Maison jardin (la société), par acte authentique du 15 février 2007.
Assignée en paiement du solde, la caution a opposé l’irrecevabilité de la demande pour non-respect de la procédure préalable de conciliation prévue par le contrat de prêt.
Pour accueillir cette fin de non-recevoir, l’arrêt retient que l’obligation de mettre en oeuvre une procédure préalable de conciliation s’analyse en une exception inhérente à la dette en ce que cette prévision est indifférente à la personne du souscripteur et ne se rapporte qu’à l’obligation souscrite, dont elle définit les modalités présidant à son admission et sa mise en exécution.
En statuant ainsi, alors que la fin de non-recevoir tirée du défaut de mise en œuvre d’une clause contractuelle qui institue une procédure de conciliation, obligatoire et préalable à la saisine du juge, ne concerne, lorsqu’une telle clause figure dans un contrat de prêt, que les modalités d’exercice de l’action du créancier contre le débiteur principal et non la dette de remboursement elle-même dont la caution est également tenue, de sorte qu’elle ne constitue pas une exception inhérente à la dette que la caution peut opposer, la cour d’appel a violé l’article 2313 du code civil, ensemble l’article 122 du code de procédure civile.
- Bail commercial – Redressement judiciaire. Cass., Civ., 3ème, 8 octobre 2015, N°14-18881.
La société civile immobilière Adam, propriétaire d’un local commercial donné à bail en renouvellement à compter du 1er janvier 1998 à la société Boucherie de la République, a assigné la locataire en constatation de l’acquisition de la clause résolutoire, subsidiairement en résiliation du bail et plus subsidiairement en validation d’un congé à effet du 1er octobre 2010, refusant le renouvellement et le paiement d’une indemnité d’éviction.
La résiliation judiciaire du bail commercial a été prononcée le 18 avril 2012.
Le mandataire-liquidateur de la société Boucherie de la République, placée en redressement judiciaire le 19 septembre 2012 puis en liquidation judiciaire, a contesté, par conclusions d’appel du 23 janvier 2013, la validité du congé et demandé le paiement d’une indemnité d’éviction.
Pour accueillir ces demandes, l’arrêt retient que l’action en contestation du congé a été interrompue et non suspendue, le 19 septembre 2012, jusqu’à la reprise d’instance le 20 décembre 2012, en application de l’article 370 du code de procédure civile, qu’un délai de deux ans a recommencé à courir le 20 décembre 2012 de sorte qu’à la date de la contestation par le mandataire soit le 23 janvier 2013, l’action en contestation du congé n’était pas prescrite ni la demande en paiement d’une indemnité pour les mêmes motifs.
En statuant ainsi, alors que le jugement de redressement judiciaire n’a d’effet interruptif que sur une instance déjà engagée et que le délai, dans lequel l’action en contestation de la validité d’un congé sans offre de renouvellement ni d’indemnité d’éviction peut être exercée par le locataire, n’est pas suspendu par son placement en redressement ou liquidation judiciaire, la cour d’appel a violé l’article 370 du code de procédure civile, ensemble l’article L. 145-60 du code de commerce.
- Bail commercial – Commandement. Cass., Civ., 3ème, 8 octobre 2015, N°14-13179.
Le 30 avril 2008, la société Sab, locataire de divers locaux commerciaux appartenant à M. John X… III et la SCI Thorez, a cédé à la société Bab son fonds de commerce de bar-restaurant.
Postérieurement à la cession, les bailleurs ont délivré à la société Bab un commandement d’avoir à remettre les lieux dans leur état d’origine en ré-affectant à l’habitation deux pièces et en restituant la jouissance d’une mansarde, puis un commandement d’avoir à remettre en état la devanture du local. Reconventionnellement à l’opposition à ces commandements formée par la société locataire, les bailleurs ont demandé que la clause résolutoire visée dans ces commandements restés infructueux leur soit déclarée acquise.
Pour rejeter cette demande, l’arrêt retient, par motifs propres et adoptés, que le cessionnaire du bail ne saurait être tenu des fautes et manquements aux clauses et conditions du bail dont il n’est pas l’auteur et que, la transformation des deux chambres en cuisine, réserve et wc avec démolition de la cloison séparative et reconstruction de nouvelles cloisons visée par le commandement du 11 juillet 2008 n’étant pas imputable à la société Bab, ce motif ne peut être retenu pour la mise en jeu de la clause résolutoire et encore qu’aux termes du bail initial tel que rapporté dans l’acte de cession du 30 avril 2008, que l’entretien et les réparations des devantures et fermetures sont à la charge du preneur et que les bailleurs ne démontrent pas que les travaux portant sur la devanture du local visés par le commandement du 20 février 2009 l’ont été en violation du règlement de copropriété de l’immeuble.
En statuant ainsi, sans rechercher, comme il le lui était demandé, si, à la suite des commandements qui lui avaient été délivrés, il n’incombait pas à la société Bab de mettre un terme à la persistance des manquements contractuels visés par le premier commandement et si la régularité d’une modification de la devanture des lieux loués visée au second commandement n’était pas, selon le bail, conditionnée à une autorisation des bailleurs, la cour d’appel n’a pas donné de base légale à sa décision au regard de l’article 1134 du code civil, ensemble l’article L. 145-41 du code de commerce.
- Contrat dit « d’agent relais » – Conditions de mise en œuvre. Cass., Com., 6 octobre 2015, N°13-28212.
http://www.legifrance.gouv.fr/affichJuriJudi.do?oldAction=rechJuriJudi&idTexte=JURITEXT000031295353&fastReqId=1895107718&fastPos=103
Par acte du 30 septembre 2003, la société Distribution automobile béthunoise (la société DAB), concessionnaire de la société Renault, a conclu avec la société Sergent un contrat dit « d’agent relais » dont l’objet était de confier à cette dernière la réparation et l’entretien des véhicules Renault, la commercialisation des pièces de rechange fournies et distribuées par la société Renault, achetées notamment auprès de son concessionnaire, ainsi que la réalisation de diverses prestations.
La société Sergent ayant refusé, au mois d’avril 2004, de signer un avenant fixant les objectifs de commercialisation de pièces de rechange pour l’année 2004, puis ayant cessé progressivement tout approvisionnement auprès de la société DAB, cette dernière a constaté la résiliation de plein droit du contrat et invité son agent à procéder à la dépose de l’enseigne Renault dont il disposait. La société Sergent s’opposant à cette résiliation, la société DAB l’a assignée en résiliation du contrat à ses torts.
Après avoir énoncé que le règlement n° 1400/2002 de la commission du 31 juillet 2002 concernant l’application de l’article 81, paragraphe 3, du traité à des catégories d’accords verticaux et de pratiques concertées dans le secteur automobile prohibe le cumul des systèmes de distribution sélective et de concession exclusive dès lors qu’un constructeur dispose d’une part de marché supérieure à 40 % sur le marché des services d’entretien, excluant tout système de distribution sélective quantitative faisant référence à la notion de territoire, l’arrêt relève que l’organisation du système mis en place par la société Renault tend à rétablir ce cumul car, de fait, l’agent relais n’a pas le choix de son concessionnaire de rattachement, les quotas l’obligeant à travailler avec le concessionnaire de proximité qui a lui-même, en application de l’article 4.2 du contrat de concession signé avec la société Renault, l’obligation de réaliser un montant de revente sur la zone géographique qui lui est attribuée par le constructeur, ce qui l’oblige à imposer des quotas à ses agents relais, et que cette organisation du réseau favorise les pressions sur les agents par le concessionnaire de rattachement, ceux-ci ne pouvant pas, de fait, nouer de relations contractuelles avec un autre concessionnaire agréé, à peine d’exclusion du réseau Renault.
De ces constatations et appréciations, la cour d’appel a pu déduire que le constructeur, qui était à l’origine des conditions de mise en œuvre du contrat litigieux, devait supporter la charge définitive des condamnations in solidum prononcées contre lui et la société DAB.
Libertés publiques – Droit humanitaire et des étrangers
- Etrangers – Absence d’audition par l’OFPRA en cas de demande de réexamen de la demande d’asile. Conseil d’État, N° 381171, 9 novembre 2015.
D’une part, lorsqu’il sollicite le réexamen de sa demande d’asile déjà rejetée par une précédente décision devenue définitive, l’étranger, du fait même de l’accomplissement de cette démarche volontaire, ne saurait ignorer que cette demande est susceptible de faire l’objet d’un refus sans avoir été préalablement convoqué par l’Office français de protection des réfugiés et apatrides (OFPRA), s’il ne fournit pas à l’appui de celle-ci d’élément nouveau susceptible, s’il est établi, de justifier les craintes de persécutions qu’il déclare éprouver ou les menaces graves de mauvais traitements qu’il déclare encourir.
D’autre part, l’étranger peut produire, à l’appui de sa demande et à tout moment de la procédure d’instruction, toutes observations écrites et tous éléments complémentaires susceptibles de venir à son soutien, au besoin en faisant état de nouveaux éléments.
Par suite, la seule circonstance que le directeur général de l’OFPRA décide, au vu de l’ensemble des éléments ainsi présentés par l’intéressé, de rejeter sa demande sans le convoquer à un entretien, comme le permet la directive 2005/85/CE du 1er décembre 2005, ne permet pas de regarder l’étranger comme ayant été privé de son droit d’être entendu, qui fait partie intégrante du respect des droits de la défense, principe général du droit de l’Union.
- Étrangers – Autorisation de séjour – Etranger malade. Conseil d’État, N° 380864, 10ème et 9ème sous-sections réunies, 9 novembre 2015.
Il résulte des dispositions combinées des articles L. 313-11 et R. 313-22 du code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile (CESEDA) ainsi que de l’arrêté d’application du 9 novembre 2011 que, dans le cas où le médecin chargé d’émettre un avis destiné au préfet auquel a été adressée une demande de titre de séjour en qualité d’étranger malade n’est pas à même de se prononcer sur l’état de santé du demandeur, faute d’avoir reçu, de la part du médecin agréé choisi par le demandeur, le rapport médical que celui-ci doit établir ou les pièces complémentaires à ce rapport qui lui ont été réclamées, il appartient au médecin de l’agence régionale de santé ou, à Paris, au médecin chef du service médical de la préfecture de police d’en informer l’autorité préfectorale.
Il incombe alors à cette dernière de porter cet élément, qui fait obstacle à la poursuite de l’instruction de la demande de séjour, à la connaissance de l’étranger afin de le mettre à même soit d’obtenir du médecin agréé qu’il a choisi qu’il accomplisse les diligences nécessaires soit, le cas échéant, de choisir un autre médecin agréé.
L’article 2 du décret n° 2001-492 du 6 juin 2001 pris pour l’application du chapitre II du titre II de la loi n° 2000-321 du 12 avril 2000 (dite DCRA), qui définit les conditions dans lesquelles l’autorité administrative doit inviter un demandeur à compléter son dossier en lui fournissant les pièces manquantes indispensables à l’instruction de la demande qui sont en sa possession, n’est pas applicable à la situation particulière de l’étranger tenu de faire établir un rapport médical pour l’instruction de sa demande de séjour présentée sur le fondement du 11° de l’article L. 313-11 du code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile, laquelle est entièrement régie par les dispositions du CESEDA et de l’arrêté du 9 novembre 2011.
- Etrangers –Transfert d’un demandeur d’asile – Prolongation du délai de transfert. Conseil d’État 21 octobre 2015, 7ème / 2ème SSR, N° 391375.
En vertu du 2 de l’article 20 du règlement (CE) n° 343/2003 du Conseil du 18 février 2003 (dit Dublin II), le délai de transfert du demandeur d’asile vers l’Etat membre responsable peut être porté de six mois à un an maximum s’il n’a pu être procédé au transfert ou à l’examen de la demande en raison d’un emprisonnement du demandeur d’asile, ou à dix-huit mois maximum si le demandeur d’asile prend la fuite
La prolongation du délai de transfert a pour effet de maintenir en vigueur la décision de remise aux autorités de l’Etat responsable et non de faire naître une nouvelle décision de remise.
Le demandeur étant informé de la décision de remise en application de l’article L. 531-1 du code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile (CESEDA), il n’a pas à être informé de la prolongation du délai de transfert dans les formes prévues par cet article pour la décision initiale. Il appartient seulement aux autorités compétentes d’informer le demandeur, au moment de la notification de la décision de remise, des cas et conditions dans lesquels le délai de transfert peut être porté à douze ou dix-huit mois et, lorsque cette décision de remise sert de fondement, après prolongation, à une mesure de rétention, de l’existence, de la date et des motifs de la prolongation.
Ces informations peuvent, dans ce cas, figurer dans les motifs de la rétention.
Court of Justice of the European Union
- Reference for a preliminary ruling — Social policy — Framework Agreement on part-time work — Organisation of working time — Directive 2003/88/EC — Right to paid annual leave — Calculation of entitlement to leave in the event of an increase in working time — Interpretation of the pro rata temporis principle. ECJ 11 November 2015, C-219/14, Kathleen Greenfield v. The Care Bureau Ltd.
http://curia.europa.eu/juris/liste.jsf?language=fr&td=ALL&num=C-219/14#
Clause 4.2 of the Framework Agreement on part-time work concluded on 6 June 1997, annexed to Council Directive 97/81/EC of 15 December 1997 concerning the Framework Agreement on part-time work concluded by UNICE, CEEP and the ETUC, as amended by Council Directive 98/23/CE of 7 April 1998, and Article 7 of Directive 2003/88/EC of the European Parliament and of the Council of 4 November 2003 concerning certain aspects of the organisation of working time must be interpreted as meaning that, in the event of an increase in the number of hours of work performed by a worker, the Member States are not obliged to provide that the entitlement to paid annual leave already accrued, and possibly taken, must be recalculated retroactively according to that worker’s new work pattern.
A new calculation must, however, be performed for the period during which working time increased.
Clause 4.2 of the Framework Agreement and Article 7 of Directive 2003/88 must be interpreted as meaning that the calculation of the entitlement to paid annual leave is to be performed according to the same principles, whether what is being determined is the allowance in lieu of paid annual leave not taken where the employment relationship is terminated, or the outstanding annual leave entitlement where the employment relationship continues.
- Reference for a preliminary ruling — Principle of non-discrimination — Article 18 TFEU — Citizenship of the Union — Article 20 TFEU — Freedom of movement for persons — Article 63 TFEU — Free movement of capital — Road use — Drivers resident in the Member State concerned — Requirement to provide on the spot proof of lawful use of vehicles registered in another Member State at a police check. ECJ, 29 October 2015, Case C-583/14, Benjámin Dávid Nagy v. Vas Megyei Rendőr-főkapitányság.
http://curia.europa.eu/juris/liste.jsf?td=ALL&language=en&jur=C,T,F&num=C-583/14#
Article 63(1) TFUE precludes national legislation under which, as a rule, only vehicles that have administrative authorisation and registration plates issued by the Member State in question may be used on the road network in that Member State and under which, if a resident of that Member State seeks to rely on a derogation from that rule, on the grounds that he uses a vehicle made available to him by the keeper of that vehicle established in another Member State, he must be able to prove on the spot, during a police check, that he fulfils the conditions for such a derogation, as laid down by the national legislation in question, on pain of the immediate imposition of a fine equivalent to that applicable in the event of infringement of the registration requirement, without any possibility of an exemption from that fine.
- Reference for a preliminary ruling — Social security — Regulation (EC) No 883/2004 — Article 67 — Regulation (EC) No 987/2009 — Article 60(1) — Payment of family benefits where parents are divorced — Definition of the ‘person concerned’ — Law of a Member State providing for the payment of family benefits to the parent who has taken the child into his household — Residence of that parent in another Member State — Failure of that parent to claim family benefits — Possibility of entitlement of the other parent to claim those family benefits. ECJ, 22 October 2015, Case C-378/14, Budesagentur für Arbeit — Familienkasse Sachsen v. Tomislaw Trapkowski.,
Article 60(1), second sentence, of Regulation (EC) No 987/2009 of the European Parliament and of the Council of 16 September 2009 laying down the procedure for implementing Regulation (EC) No 883/2004 on the coordination of social security systems must be interpreted as meaning that the deeming provision included there may lead to the grant of entitlement to family benefits for a person who does not reside in the Member State responsible for paying those benefits where all the other conditions for the grant of those benefits laid down by national law are met, a matter which is for the referring court to determine.
Article 60(1), third sentence, of Regulation No 987/2009 must be interpreted as meaning that there is no requirement that the parent of the child for whom child benefits are paid, who resides in the Member State obliged to pay those benefits, must be granted entitlement to those benefits on the ground that the other parent, who resides in another Member State, has not applied for them.
- Reference for a preliminary ruling — Personal data — Protection of individuals with regard to the processing of such data — Charter of Fundamental Rights of the European Union — Articles 7, 8 and 47 — Directive 95/46/EC — Articles 25 and 28 — Transfer of personal data to third countries — Decision 2000/520/EC — Transfer of personal data to the United States — Inadequate level of protection — Validity — Complaint by an individual whose data has been transferred from the European Union to the United States — Powers of the national supervisory authorities. ECJ, 6 October 2015, Case C-362/14, Maximillian Schrems v. Data Protection Commissioner, Digital Rights Ireland Ltd.
Article 25(6) of Directive 95/46/EC of the European Parliament and of the Council of 24 October 1995 on the protection of individuals with regard to the processing of personal data and on the free movement of such data as amended by Regulation (EC) No 1882/2003 of the European Parliament and of the Council of 29 September 2003, read in the light of Articles 7, 8 and 47 of the Charter of Fundamental Rights of the European Union, must be interpreted as meaning that a decision adopted pursuant to that provision, such as Commission Decision 2000/520/EC of 26 July 2000 pursuant to Directive 95/46 on the adequacy of the protection provided by the safe harbour privacy principles and related frequently asked questions issued by the US Department of Commerce, by which the European Commission finds that a third country ensures an adequate level of protection, does not prevent a supervisory authority of a Member State, within the meaning of Article 28 of that directive as amended, from examining the claim of a person concerning the protection of his rights and freedoms in regard to the processing of personal data relating to him which has been transferred from a Member State to that third country when that person contends that the law and practices in force in the third country do not ensure an adequate level of protection.