04 Déc NEWSLETTER – DÉCEMBRE 2018
Droit du travail et sécurité sociale
Droits des affaires, concurrence, distribution et consommation
Libertés publiques – Droit humanitaire et des étrangers
Cour de Justice de l’Union Européenne
Droit du travail et sécurité sociale
- Licenciement pour motif économique – Procédure. Cass. Soc., 17 Octobre 2018,N°17-14392.
M. X…, engagé à compter du 13 juillet 2009 en qualité de responsable commercial par la société Tap production, aux droits de laquelle est venue la société Tap France, a été licencié pour motif économique le 17 juin 2011 dans le cadre d’un licenciement économique collectif. Il a saisi la juridiction prud’homale, notamment d’une demande en paiement de dommages-intérêts pour irrégularité de la procédure de licenciement, sur le fondement de l’article L. 1235-15 du code du travail.
Il résulte de l’application combinée de l’article L. 1235-15 du code du travail, ensemble l’alinéa 8 du Préambule de la Constitution du 27 octobre 1946, l’article 27 de la Charte des droits fondamentaux de l’Union européenne, l’article 382, devenu 1240, du code civil et l’article 8 § 1 de la Directive n° 2002/14/CE du 11 mars 2002 établissant un cadre général relatif à l’information et la consultation des travailleurs dans la Communauté européenne que l’employeur qui met en oeuvre une procédure de licenciement économique, alors qu’il n’a pas accompli, bien qu’il y soit légalement tenu, les diligences nécessaires à la mise en place d’institutions représentatives du personnel et sans qu’un procès-verbal de carence ait été établi, commet une faute qui cause un préjudice aux salariés, privés ainsi d’une possibilité de représentation et de défense de leurs intérêts.
Pour confirmer le jugement ayant débouté le salarié de sa demande en paiement de dommages-intérêts pour irrégularité de la procédure de licenciement pour motif économique, l’arrêt retient que la société reconnaît ne pas avoir rempli ses obligations au titre de l’article L. 1235-15 du code du travail mais que le salarié ne démontre pas la réalité d’un préjudice.
En statuant ainsi, la cour d’appel a violé le premier des textes susvisés.
L’employeur qui met en œuvre une procédure de licenciement économique, alors qu’il n’a pas accompli, bien qu’il y soit légalement tenu, les diligences nécessaires à la mise en place d’institutions représentatives du personnel et sans qu’un procès-verbal de carence ait été établi, commet une faute qui cause un préjudice aux salariés privés ainsi d’une possibilité de représentation et de défense de leurs intérêts.
- Section syndicale – Désignation d’un représentant. Cass., Soc., 17 octobre 2018, N°18-60030.
Par courrier du 7 octobre 2017, reçu le 12 octobre 2017, l’Union des syndicats anti-précarité a désigné M. X… comme représentant de section syndicale au sein de la société Val d’Europe Airports (la société). Par requête du 25 octobre 2017, la société a contesté cette désignation.
Les documents comptables dont la loi impose la confection et la publication ne constituent que des éléments de preuve de la transparence financière, leur défaut pouvant dès lors être suppléé par d’autres documents produits par le syndicat et que le juge doit examiner.
Ayant constaté qu’au moment de la désignation du représentant de section syndicale contestée par l’employeur, l’Union des syndicats anti-précarité ne justifiait pas de la publication des comptes sur le site internet du syndicat ni par toute autre mesure de publicité équivalente, le tribunal a légalement justifié sa décision.
- Comité d’entreprise – Règlement intérieur. Cass., Soc., 17 octobre 2018, N°17-13256.
Le 29 septembre 2015, a été adopté un règlement intérieur du comité d’entreprise de la société Start people, prévoyant notamment en son article 5 que « les frais de déplacement et d’hébergement liés aux commissions obligatoires du comité d’entreprise sont pris en charge par le comité d’entreprise après présentation des justificatifs ». Estimant cette clause illicite, M. X…, Mme Y…, M. Z…, Mme A…, Mme C…, M. D… et l’Union syndicale de l’intérim CGT ont assigné en référé le comité d’entreprise et l’employeur pour obtenir la suspension de la clause et le remboursement par l’employeur au comité d’entreprise des sommes éventuellement engagées en application de celle-ci.
La cour d’appel a décidé exactement qu’en l’absence de disposition le prévoyant, l’employeur n’est pas tenu de prendre en charge les frais de déplacement et d’hébergement exposés pour se rendre aux réunions des commissions internes au comité d’entreprise, dès lors que les réunions de ces commissions ne sont pas légalement obligatoires ou ne sont pas organisées à l’initiative de l’employeur.
- Plan de départs volontaires – Nullité. Cass., Soc., 17 octobre 2018, N°17-16869, 17-16872, 17-16874, 17-16877, 17-16883, 17-16889, 17-16890, 17-16891, 17-16895, 17-16898, 17-16900, 17-16903, 17-16904 et 17-16906.
Mme X… et treize autres salariés, engagés par la société Altran technologies à différentes dates et fonctions, ont signé en septembre 2009 une convention de rupture d’un commun accord dans le cadre d’un projet de plan personnalisé de départs volontaires pour motif économique (PDV1) s’inscrivant dans un plan de sauvegarde de l’emploi, élaboré dans le cadre d’une procédure visant à réduire de 500 les effectifs de salariés au sein de la filière automobile. Sur une assignation en référé à l’initiative du comité d’établissement Altran Sud-Ouest du 7 août 2009, le tribunal de grande instance de Toulouse a, par ordonnance du 17 septembre 2009, suspendu la mise en oeuvre du plan de départs volontaires dans l’attente de la décision du juge du fond, lequel, par jugement du 15 octobre 2009, a annulé le plan personnalisé de départs volontaires (PDV1) de la société Altran technologies au motif que le volet sur les mesures de reclassement externe présentait un contenu insuffisant. A la suite de cette décision, la société Altran technologies a présenté un deuxième plan de départs volontaires (PDV2), au cours d’une nouvelle réunion d’information-consultation du comité central d’entreprise le 3 décembre 2009. Mme X… et treize autres salariés ont saisi le conseil de prud’hommes de Paris le 24 mars 2011 aux fins de voir annuler la convention de rupture d’un commun accord signée dans le cadre du PDV1 avec l’employeur, dire que la rupture du contrat de travail s’analyse en conséquence en un licenciement sans cause réelle et sérieuse, et obtenir la condamnation de l’employeur à leur verser diverses sommes à titre, notamment, de rappel de salaire et accessoires depuis la date de la rupture du contrat de travail jusqu’à la mise en place d’un nouveau plan de départs volontaires (PDV2), indemnités de rupture, dommages-intérêts pour licenciement nul, paiement des jours de fractionnement et heures supplémentaires.
Ayant rappelé que, lorsqu’elle s’analyse en un licenciement sans cause réelle et sérieuse, la rupture du contrat de travail du salarié ouvre droit pour ce dernier au paiement de dommages et intérêts, la cour d’appel, qui s’est bornée à solliciter des intéressés qu’ils présentent une demande de dommages et intérêts ensuite de l’absence de cause réelle et sérieuse de la rupture du contrat de travail, n’a pas manqué à l’impartialité.
Il résulte de l’article L. 1235-10 du code du travail, dans sa rédaction applicable au litige, que la nullité qui affecte un plan de départs volontaires ne répondant pas aux exigences légales, s’étend à tous les actes subséquents, qu’en particulier la convention de rupture du contrat de travail consécutive à un départ volontaire lorsqu’il a une cause économique et s’inscrit dans un processus de réduction des effectifs, exclusif de tout licenciement, donnant lieu à l’établissement de ce plan, est elle-même nulle, peu important que les salariés n’aient pas été parties ou représentés à l’action en nullité dudit plan.
Ayant constaté que le départ volontaire des salariés s’inscrivait expressément dans le cadre du plan personnalisé de départs volontaires 1 annulé par jugement du tribunal de grande instance de Toulouse le 15 octobre 2009, la cour d’appel, qui a retenu que l’annulation de ce plan avait pour conséquence de priver de toute cause le départ volontaire des salariés qui en constituait un acte subséquent, a exactement décidé que la nullité du plan de départs volontaires entraînait celle des conventions de rupture qui lui étaient rattachées.
La nullité qui affecte un plan de départs volontaires ne répondant pas aux exigences légales s’étend à tous les actes subséquents, en ce compris la convention de rupture du contrat de travail consécutive à un départ volontaire lorsqu’il a une cause économique et s’inscrit dans un processus de réduction des effectifs, exclusif de tout licenciement, peu important que le salarié n’ait pas été partie ou représenté à l’action en nullité dudit plan.
- Accord collectif – Egalité de traitement. Cass., Soc., 17 octobre 2018, N°16-26729 et 16-26731.
Le principe d’égalité de traitement ne fait pas obstacle à ce que les salariés embauchés postérieurement à l’entrée en vigueur d’un nouveau barème conventionnel soient appelés dans l’avenir à avoir une évolution de carrière plus rapide dès lors qu’ils ne bénéficient à aucun moment d’une classification ou d’une rémunération plus élevée que celle des salariés embauchés antérieurement à l’entrée en vigueur du nouveau barème et placés dans une situation identique ou similaire.
M. X… et Mme Y…, engagés par des URSSAF aux droits desquelles vient l’URSSAF Aquitaine et respectivement nommé inspecteur à l’URSSAF de Pau le 1er juin 1989 et promue agent de contrôle à l’URSSAF de Paris le 1er mars 1987, ont saisi la juridiction prud’homale de demandes de rappels de salaires en invoquant l’application de l’article 32 de la convention collective du personnel des organismes de sécurité sociale du 8 février 1957.
Pour dire que les salariés ont été victimes d’une différence de traitement en ce que l’URSSAF leur a refusé le bénéfice de l’article 32 de la convention collective du personnel des organismes de la sécurité sociale et des allocations familiales, les arrêts retiennent que les salariés relèvent, au regard de la date de leur entrée en fonction en qualité d’agent de contrôle, de la convention collective applicable de 1976 au 31 décembre 1992, qu’ils n’ont cependant bénéficié d’aucun des échelons prévus à l’article 32 de la convention collective, que le protocole du 14 mai 1992 a en partie remanié les articles 29 à 33 de la convention collective, principalement l’article 33, que dès lors et au terme d’une lecture littérale de cet article, la Cour de cassation a dit que les agents relevant de l’application du protocole de 1992, devaient continuer à bénéficier des échelons qualifiés par l’article 32 « d’échelons d’avancement conventionnel » acquis du fait de l’obtention du diplôme précité, à la suite de leur promotion, puisque seuls « les échelons supplémentaires d’avancement conventionnel » de l’article 29 étaient concernés par l’application de l’article 33, que cette analyse du protocole du 14 mai 1992 a été acceptée par l’URSSAF qui l’a en conséquence mise en oeuvre et a procédé aux régularisations qui en découlaient, qu’il en est résulté une différence de traitement manifeste entre les inspecteurs de recouvrement de l’URSSAF recrutés avant et après l’application du protocole de 1992 puisque les premiers ne pouvaient prétendre à un complément de rémunération accordé – en considération d’un événement dont ils justifiaient les uns comme les autres (obtention du même diplôme) – aux seuls inspecteurs entrés en fonction après 1993, qui exerçaient pourtant les mêmes fonctions que leurs collègues plus anciens, que pour justifier la différence de traitement l’employeur ne peut opposer le principe selon lequel les différences de traitement entre catégories professionnelles opérées par voie de conventions ou d’accords collectifs négociés et signés par des organisations syndicales représentatives sont présumées justifiées et qu’il appartient à celui qui les conteste de démontrer qu’elles sont étrangères à toute considération de nature professionnelle, dès lors qu’en l’espèce, la différence de traitement a lieu au sein d’une même catégorie professionnelle et pour des agents occupant exactement le même emploi et travaillant dans des conditions identiques, qu’il a été jugé qu’au regard du respect du principe à travail égal, salaire égal, la seule circonstance que les salariés aient été engagés avant ou après l’entrée en vigueur d’un accord collectif ne saurait suffire à justifier des différences de traitement entre eux, pour autant que cet accord collectif n’a pas pour objet de compenser un préjudice subi par les salariés présents dans l’entreprise lors de son entrée en vigueur, ce qui n’est manifestement pas le cas en l’espèce, puisque ce sont les seuls agents engagés après l’entrée en vigueur du protocole qui bénéficient de l’avantage litigieux, qu’en l’espèce, force est de constater qu’aucun élément objectif ne justifie cette différence.
En statuant ainsi, sans constater que des salariés engagés après l’entrée en vigueur du nouveau barème conventionnel et placés dans une situation identique ou similaire avaient bénéficié d’une classification ou d’une rémunération supérieures à celles de M. X… et Mme Y…, la cour d’appel a violé le principe susvisé et le principe d’égalité de traitement, ensemble la convention collective du personnel des organismes de la sécurité sociale et des allocations familiales du 8 février 1957 et le protocole du 14 mai 1992.
- Contrat de travail – Résolution judiciaire. Cass., Soc., 17 octobre 2018, N°17-17985.
Engagé le 1er juillet 2001 par la société d’expertise comptable Palmese et associés en qualité d’assistant confirmé, M. X… a exercé les fonctions de conseiller du salarié à compter de mars 2012 et s’est présenté comme candidat aux élections des délégués du personnel en avril 2015. Suivant autorisation de l’inspecteur du travail en date du 10 octobre 2015 confirmée le 27 mai 2016 par le ministre du travail, il a été licencié le 12 octobre 2015 pour inaptitude et impossibilité de reclassement. Le 17 avril 2014, il avait saisi la juridiction prud’homale en résiliation judiciaire de son contrat de travail pour manquement de l’employeur à diverses obligations, dont l’obligation de sécurité.
Ayant relevé que bien qu’ayant connaissance des répercussions immédiates causées sur la santé du salarié par une première altercation avec l’un de ses collègues, des divergences de vues et des caractères très différents voire incompatibles des protagonistes et donc du risque d’un nouvel incident, la société n’avait pris aucune mesure concrète pour éviter son renouvellement hormis une réunion le lendemain de l’altercation et des réunions périodiques de travail concernant l’ensemble des salariés, qu’elle n’avait ainsi pas mis en place les mesures nécessaires permettant de prévenir ce risque, assurer la sécurité du salarié et protéger sa santé physique et mentale conformément aux articles L. 4121-1 et L. 4121-2 du code du travail, la cour d’appel a caractérisé un manquement de l’employeur à son obligation de sécurité et a légalement justifié sa décision.
Dans le cas où une demande d’autorisation de licenciement d’un salarié protégé est motivée par son inaptitude physique, il appartient à l’administration du travail de vérifier que celle-ci est réelle et justifie son licenciement. Il ne lui appartient pas en revanche, dans l’exercice de ce contrôle, de rechercher la cause de cette inaptitude, y compris dans le cas où la faute invoquée résulte d’un harcèlement moral dont l’effet, selon les dispositions combinées des articles L. 1152-1 à L. 1152-3 du code du travail, serait la nullité de la rupture du contrat de travail. Ce faisant, l’autorisation de licenciement donnée par l’inspecteur du travail ne fait pas obstacle à ce que le salarié fasse valoir devant les juridictions judiciaires tous les droits résultant de l’origine de l’inaptitude lorsqu’il l’attribue à un manquement de l’employeur à ses obligations. Toutefois, le juge ne peut, sans violer le principe de la séparation des pouvoirs, se prononcer sur une demande de résiliation judiciaire postérieurement au prononcé du licenciement notifié sur le fondement d’une autorisation administrative de licenciement accordée à l’employeur.
Pour dire la juridiction prud’homale incompétente pour statuer sur la demande de dommages-intérêts pour rupture abusive du contrat de travail et la demande d’indemnité compensatrice de préavis, l’arrêt énonce qu’au vu de la loi des 16-24 août 1790 et de l’article L. 2411-1 du code du travail, le juge judiciaire ne peut sans violer le principe de séparation des pouvoirs se prononcer sur une demande de résiliation judiciaire postérieurement au prononcé du licenciement notifié sur le fondement d’une autorisation administrative de licenciement accordée à l’employeur et, par voie de conséquence, sur les demandes afférentes à un licenciement abusif, même si, comme en l’espèce, la saisine du conseil des prud’hommes est antérieure à la rupture.
Cependant, dans le cas où une demande d’autorisation de licenciement d’un salarié protégé est motivée par son inaptitude physique, il appartient à l’administration du travail de vérifier que celle-ci est réelle et justifie son licenciement. Il ne lui appartient pas en revanche, dans l’exercice de ce contrôle, de rechercher la cause de cette inaptitude, y compris dans le cas où la faute invoquée résulte d’un harcèlement moral dont l’effet, selon les dispositions combinées des articles L. 1152-1 à L. 1152-3 du code du travail, serait la nullité de la rupture du contrat de travail.
Ce faisant, l’autorisation de licenciement donnée par l’inspecteur du travail ne fait pas obstacle à ce que le salarié fasse valoir devant les juridictions judiciaires tous les droits résultant de l’origine de l’inaptitude lorsqu’il l’attribue à un manquement de l’employeur à ses obligations. A cet égard, si le juge ne peut, sans violer le principe de la séparation des pouvoirs, se prononcer sur une demande de résiliation judiciaire postérieurement au prononcé du licenciement notifié sur le fondement d’une autorisation administrative de licenciement accordée à l’employeur, il lui appartient, le cas échéant, de faire droit aux demandes de dommages-intérêts au titre de l’absence de cause réelle et sérieuse du licenciement.
En statuant comme elle l’a fait, sans examiner la demande de dommages-intérêts pour rupture abusive fondée sur les manquements de l’employeur à son obligation de sécurité à l’origine de l’inaptitude et d’indemnité compensatrice de préavis, la cour d’appel a violé la loi des 16-24 août 1790 ensemble le principe de séparation des pouvoirs, l’article L. 2421-3, alors applicable, et l’article L. 4121-1 du code du travail.
- Règlement intérieur – Application. Cass., Soc., 17 octobre 2018, N°17-16465.
Statuant en référé, la société DHL international express France, qui a repris l’activité et les salariés de l’une des cinq entités économiques de la société DHL express, a appliqué le règlement intérieur qui avait été élaboré par cette dernière.
La cour d’appel a exactement retenu que le règlement intérieur s’imposant aux salariés avant le transfert de plein droit de leurs contrats de travail, aux termes de l’article L. 1224-1 du code du travail, vers une société nouvellement créée n’était pas transféré avec ces contrats de travail, dès lors que ce règlement constitue un acte réglementaire de droit privé dont les conditions sont encadrées par la loi et que l’article R. 1321-5 du même code impose à une telle entreprise nouvelle d’élaborer un règlement intérieur dans les trois mois de son ouverture. Elle en a déduit à bon droit que l’application par la nouvelle société DHL international express de ce règlement intérieur en matière disciplinaire constituait un trouble manifestement illicite qu’il lui appartenait de faire cesser.
Dans le cadre d’un transfert d’entreprise dans une société nouvellement créée, le règlement intérieur de l’entité cédée n’est pas transféré au cessionnaire.
- Section syndicale – Représentant. Cass., Soc., 17 octobre 2018, N°17-19732.
Le 9 janvier 2017, M. A…, agissant au nom des sociétés Aquanet services, Cofrem et Afranett, a saisi le tribunal d’instance d’une contestation portant sur la désignation de M. X… par le syndicat Force ouvrière des salariés d’entreprises de propreté de la région Ile-de-France en qualité de représentant de section syndicale du 3 janvier 2017.
Les documents comptables dont la loi impose la confection et la publication ne constituent que des éléments de preuve de la transparence financière, leur défaut pouvant dès lors être suppléé par d’autres documents produits par le syndicat et que le juge doit examiner.
Ayant constaté que le syndicat Force ouvrière des salariés d’entreprises de propreté de la région Ile-de-France avait, avant la nomination de M. X… en qualité de représentant de section syndicale le 3 janvier 2017, fait établir ses comptes 2013 et 2014 par un expert-comptable le 7 juin 2016, les avait fait approuver par le conseil syndical le 22 juin 2016 et publier auprès de la Direccte le 20 août 2016 et que les comptes 2015 avaient été approuvés et publiés à la Direccte en mars et avril 2017, le tribunal a pu en déduire que le critère de transparence financière était satisfait lors de la désignation de M. X… en qualité de représentant de section syndicale.
Si les documents comptables dont la loi impose la confection et la publication ne constituent que des éléments de preuve de la transparence financière, leur défaut pouvant être suppléé par d’autres documents produits par le syndicat, il ne semble pas possible de se contenter d’une publication des comptes sur Facebook.
- Contrat de travail – Requalification. Cass., Soc., 10 octobre 2018, N°17-18294.
M. X… a été engagé en qualité de peintre par la société Jean C… suivant contrat de travail à durée déterminée du 12 juillet 2010 arrivant à échéance le 26 novembre suivant. Ce contrat a été prolongé jusqu’au 23 décembre 2010. Le 5 janvier 2011, le salarié a signé un nouveau contrat de travail à durée déterminée pour une durée s’achevant le 30 novembre 2011, puis le 1er décembre 2011, un contrat de travail à durée indéterminée. Il a saisi la juridiction prud’homale à l’effet d’obtenir la requalification des contrats de travail à durée déterminée en un contrat de travail à durée indéterminée et le paiement de diverses sommes.
Pour rejeter la demande de requalification du contrat de travail à durée déterminée du 5 janvier 2011 en un contrat de travail à durée indéterminée et les demandes indemnitaires subséquentes du salarié, l’arrêt retient que ce second contrat de travail à durée déterminée avait pour objet de pourvoir au remplacement d’un salarié permanent de l’entreprise, que dès lors ce remplacement ne s’effectuait nullement sur le poste de travail dont la création et l’existence étaient la conséquence d’un surcroît d’activité et avait justifié la conclusion du premier contrat de travail, que le délai de douze jours entre les deux contrats était suffisant compte tenu de l’ancienneté de M. X… dans l’entreprise.
Cependant, l’article L. 1244-4 du code du travail n’exclut l’application des dispositions de l’article L. 1244-3 imposant le respect d’un délai de carence avant la conclusion d’un nouveau contrat à durée déterminée que dans les situations qu’il mentionne. Il en résulte qu’une succession de contrats de travail à durée déterminée, sans délai de carence, n’est licite, pour un même salarié et un même poste, que si chacun des contrats a été conclu pour l’un des motifs prévus limitativement par l’article L. 1244-4 du code du travail.
En statuant comme elle l’a fait, alors qu’il ressortait de ses constatations que le premier contrat de travail à durée déterminée avait été conclu entre les parties en raison d’un accroissement temporaire de l’activité de l’entreprise, soit pour un motif non prévu à l’article L. 1244-4 du code du travail, de sorte qu’un délai de carence répondant aux exigences de l’article L. 1244-3 du même code devait être observé avant la conclusion du second contrat de travail à durée déterminée pour remplacement d’un salarié, la cour d’appel a violé les articles L. 1244-3 et L. 1244-4 du code du travail, ensemble l’article L. 1245-1 du même code, dans leur rédaction applicable en la cause.
Une succession de CDD, sans délai de carence, n’est licite, pour un même salarié et un même poste, que si chacun des contrats a été conclu pour l’un des motifs prévus limitativement par l’article L. 1244-4 du code du travail, de sorte qu’un contrat conclu pour remplacement ne peut immédiatement succéder à un contrat conclu pour accroissement temporaire d’activité.
- Maladie professionnelle – Inaptitude. Cass., Soc., 10 octobre 2018, N°17-11019.
Mme X… a été engagée le 1er août 2000 par la société Feu vert en qualité d’hôtesse de caisse. Le 18 novembre 2010, l’affection de l’épaule dont souffrait la salariée a été prise en charge au titre de la législation sur les risques professionnels. A ‘issue de deux examens médicaux des 12 et 26 septembre 2011, le médecin du travail l’a déclarée inapte à son poste. Elle a été licenciée pour inaptitude et impossibilité de reclassement le 3 février 2014 après autorisation de l’inspecteur du travail du 21 janvier 2014 et a saisi la juridiction prud’homale.
Mme X… a été engagée le 1er août 2000 par la société Feu vert en qualité d’hôtesse de caisse. Le 18 novembre 2010, l’affection de l’épaule dont souffrait la salariée a été prise en charge au titre de la législation sur les risques professionnels. A ‘issue de deux examens médicaux des 12 et 26 septembre 2011, le médecin du travail l’a déclarée inapte à son poste. Elle a été licenciée pour inaptitude et impossibilité de reclassement le 3 février 2014 après autorisation de l’inspecteur du travail du 21 janvier 2014 et a saisi la juridiction prud’homale.
Si la juridiction prud’homale est seule compétente pour statuer sur le bien-fondé de la rupture du contrat de travail, relève, en revanche, de la compétence exclusive du tribunal des affaires de sécurité sociale l’indemnisation des dommages résultant d’un accident du travail ou d’une maladie professionnelle, qu’ils soient ou non la conséquence d’un manquement de l’employeur à son obligation de sécurité.
Ayant constaté que sous le couvert de demandes indemnitaires fondées sur le manquement de l’employeur à son obligation de sécurité, la salariée, sans contester le bien-fondé de la rupture, demandait en réalité la réparation par l’employeur d’un préjudice né de sa maladie professionnelle, la cour d’appel, qui n’a pas méconnu l’objet du litige ni refusé de statuer sur les prétentions dont elle était saisie, a exactement décidé que de telles demandes ne pouvaient être formées que devant la juridiction de la sécurité sociale.
La demande d’indemnités, formée par un salarié licencié pour inaptitude dont la maladie est prise en charge au titre des risques professionnels, et fondée sur le manquement de son employeur à l’obligation de sécurité, sans que la rupture du contrat ne soit contestée, correspond à la réparation d’un préjudice né de la maladie professionnelle pour laquelle seules les juridictions de sécurité sociale sont compétentes.
- Licenciement – Transaction. Cass., Soc., 10 octobre 2018, N°17-10066.
M. X… a été engagé, en qualité de technico-commercial, par la société Caraibe Greement, à compter du 1er avril 2007. Une lettre de licenciement datée du 10 septembre 2011 lui a été remise en main propre. Il a signé avec l’employeur un protocole transactionnel le 14 novembre 2011. Contestant la validité de la transaction, le salarié a saisi la juridiction prud’homale.
Pour déclarer valable la transaction et rejeter les demandes du salarié, l’arrêt retient que la transaction a été conclue postérieurement à la notification du licenciement au salarié.
En statuant ainsi, alors qu’il résultait de ses constatations que la transaction avait été conclue en l’absence de notification préalable du licenciement par lettre recommandée avec demande d’avis de réception, ce dont il résultait qu’elle était nulle, la cour d’appel a violé les articles L. 1232-6 et L. 1231-4 du code du travail, ensemble l’article 2044 du code civil, dans leur rédaction applicable à la cause.
La transaction conclue alors que le licenciement du salarié n’a pas été notifié par lettre recommandée avec avis de réception est nulle, faute de pouvoir attester avec certitude de la date du licenciement.
- Durée du travail – Obligation de sécurité. Cass., Soc., 10 octobre 2018, N°17-10248.
L’association pour la sauvegarde de l’enfance et de l’adolescence de la Corrèze a engagé Mme X… à compter du 4 mars 2013 en qualité d’accueillante permanente responsable d’un lieu de vie d’enfants en difficulté ou handicapés, moyennant une rémunération forfaitaire sur la base de deux cent cinquante-huit jours travaillés par année. En arrêt de travail pour maladie depuis le 23 mai 2014, la salariée, contestant les conditions de son contrat et imputant la dégradation de son état de santé à une charge de travail excessive, a saisi la juridiction prud’homale le 23 décembre 2014 aux fins de résiliation judiciaire de son contrat de travail. Elle a été licenciée pour inaptitude et impossibilité de reclassement le 27 août 2015.
Ayant constaté que l’employeur s’était abstenu, en toute connaissance de cause, d’assurer un suivi de la charge de travail de la salariée, soumise à une durée du travail déraisonnable, la cour d’appel, qui a fait ressortir que l’employeur avait ainsi manqué à son obligation de sécurité et que ce manquement avait empêché la poursuite du contrat de travail, a légalement justifié sa décision.
Selon l’article 1er alinéa 1er du code civil, les lois et, lorsqu’ils sont publiés au journal officiel de la République française, les actes administratifs entrent en vigueur à la date qu’ils fixent ou, à défaut, le lendemain de leur publication. Toutefois, l’entrée en vigueur de celles de leurs dispositions dont l’exécution nécessite des mesures d’application est reportée à la date d’entrée en vigueur de ces mesures.
Pour appliquer le forfait annuel de deux cent cinquante-huit jours prévu par l’article L. 433-1 du code de l’action sociale et des familles pour les permanents responsables et les assistants permanents exerçant au sein des lieux de vie et d’accueil autorisés en application de l’article L. 313-1 du même code, l’arrêt retient que l’absence de décret d’application concernant les modalités de suivi de l’organisation du travail des salariés concernés n’a pas pour conséquence de priver d’effets les autres dispositions de ce texte.
En statuant ainsi, alors que le droit à la santé et au repos est au nombre des exigences constitutionnelles et qu’elle constatait que le décret d’application auquel renvoie l’article L. 433-1 susvisé, pour la détermination des modalités de suivi de l’organisation du travail des salariés concernés, nécessaire à la garantie du droit à la santé et au repos par une amplitude et une charge de travail raisonnables assurant une bonne répartition dans le temps du travail du salarié, n’était pas intervenu à la date d’exécution de la prestation de travail, la cour d’appel a violé le texte susvisé.
- Protocole préélectoral – UES. Cass., Soc., 3 octobre 2018, N°17-21836.
Si des modifications négociées entre le chef d’entreprise et les organisations syndicales intéressées peuvent être apportées à un protocole préélectoral, ces modifications ne peuvent résulter que d’un avenant soumis aux mêmes conditions de validité que le protocole lui-même.
Par accord collectif du 24 juin 2010, une unité économique et sociale a été créée entre quinze sociétés du groupe J…, prévoyant la création de deux comités centraux d’entreprise. Le 21 avril 2011, un protocole d’accord préélectoral a été signé entre les représentants de l’UES et les organisations syndicales centrales pour la mise en place du comité central d’entreprise de la branche dermo-cosmétique (le CCE). Ce protocole prévoyait notamment que dans le cas où un membre titulaire du CCE cesserait son mandat en cours d’exercice, il serait remplacé par un suppléant. M. G…, membre du CCE en qualité de représentant du comité d’établissement de […] ayant démissionné en février 2015, il a été procédé à l’élection de son remplaçant par le comité d’établissement de […] en mars 2015. Les représentants de la direction centrale de l’UES ont contesté cette élection en juillet 2015.
Pour débouter les représentants de l’UES de leur demande, la cour d’appel retient, d’une part que le choix du chef d’entreprise de procéder au remplacement d’un titulaire au comité central d’entreprise par voie d’élection, en l’absence d’opposition des représentants élus ou des organisations syndicales, ne peut être en soi sanctionné alors qu’il est plus favorable à l’expression de la démocratie dans l’entreprise. Dès lors qu’ils avaient reçu sans réagir les procès-verbaux de réunion du comité d’établissement du […] en mars 2015, les membres de la direction centrale, qui n’ont réagi qu’en juillet 2015, lors de la préparation de la réunion du CCE, ont de fait renoncé à agir. Enfin, que la désignation du remplaçant n’a été effective que pour la durée du mandat en cours qui s’est achevé en octobre 2016.
En statuant ainsi alors, d’une part que l’intérêt à agir doit être apprécié lors de l’engagement de l’action, et d’autre part qu’il n’était ni invoqué ni justifié d’un accord entre les représentants de l’UES et les organisations syndicales centrales intéressées, aux conditions de double majorité exigées par l’article L. 2324-4-1 du code du travail, pour modifier les conditions de remplacement d’un membre titulaire du CCE par son suppléant, la cour d’appel a violé l’article L. 2324-4-1 du code du travail, dans sa rédaction alors applicable.
Si des modifications négociées entre le chef d’entreprise et les organisations syndicales intéressées peuvent être apportées à un protocole préélectoral, ces modifications ne peuvent résulter que d’un avenant soumis aux mêmes conditions de validité que le protocole lui-même.
- Elections professionnelles – Panachage. Cass., Soc., 3 octobre 2018, N°17-14570.
A défaut d’accord unanime entre les membres du collège mentionné à l’article susvisé, la délégation du personnel au comité d’hygiène, de sécurité et des conditions de travail (CHSCT) est élue au scrutin de liste avec représentation proportionnelle à la plus forte moyenne et à un seul tour. Toute candidature individuelle constitue une liste et le panachage des listes n’est pas admis.
Le 26 octobre 2016, la direction de la société Magasins Galeries Lafayette a convoqué les membres du comité d’établissement et les délégués du personnel à une réunion préparatoire à l’élection des membres du CHSCT, qui s’est tenue le 2 novembre 2016, l’élection étant prévue pour le 8 novembre suivant. Le 23 novembre 2016, le syndicat CGT du Bas-Rhin, le syndicat CFDT des services et commerces du Bas-Rhin (le syndicat), Mme I… , MM. Y…, Z… et A… ont saisi le tribunal d’instance pour faire annuler ces élections.
Pour débouter le syndicat, Mme I… , MM. Y…, Z… et A…, le tribunal a constaté que treize votants ont participé à la désignation et que vingt et un votes ont été comptabilisés, mais a retenu que le recours au panachage avait été autorisé par un accord unanime implicite et que le choix des modalités de scrutin pouvait résulter d’un accord unanime quand bien même ledit accord n’aurait pas été exprès.
En statuant ainsi, alors que le recours au panachage des listes n’est pas admis, le tribunal d’instance a violé l’article L. 4613-1 du code du travail alors applicable.
En l’absence d’accord unanime entre les membres du collège désignatif, le panachage des listes n’est pas admis lors de l’élection de la délégation du personnel au CHSCT.
- CHSCT – Procédure d’information consultation. Cass. Soc., 3 octobre 2018, N°17-20301.
La direction des services partagés (DSP) de la société Electricité de France (EDF), envisageant une nouvelle cartographie de ses sites d’implantation, a les 24 et 26 mai 2016 engagé une procédure d’information consultation des deux comités d’établissement ainsi que des vingt-six comités d’hygiène, de sécurité et des conditions de travail (CHSCT) implantés en son sein relative à un « projet de schéma directeur des implantations des entités de la DSP ». Le 24 juin 2016, estimant ne pas disposer des informations suffisantes pour rendre un avis motivé, les deux comités d’établissement et dix-sept CHSCT ont saisi le président du tribunal de grande instance statuant en la forme des référés. Huit autres CHSCT sont intervenus volontairement à l’instance.
Le CHSCT, qui dans le cadre d’une procédure d’information consultation doit rendre son avis au comité d’établissement, a qualité pour agir devant le président du tribunal de grande instance statuant en la forme des référés aux fins de communication par l’employeur d’éléments d’information supplémentaires.
La cour d’appel qui a constaté que les deux comités d’établissement avaient sollicité le concours des CHSCT sur le volet conditions de travail et impact sur la santé du schéma directeur d’implantation des deux entités de la DSP, et demandé la transmission de leur avis, en a exactement déduit que l’action et l’intervention volontaire des différents CHSCT étaient recevables.
Le CHSCT a qualité pour agir devant le président du tribunal de grande instance statuant en la forme des référés afin que l’employeur lui communique des éléments d’information supplémentaires.
- Statut protecteur – Résolution judiciaire du contrat de travail. Cass., Soc., 3 octobre 2018, N°16-19836.
M. Y… a été engagé le 4 septembre 2001 par la société Diffusion internationale d’articles manufacturés France en qualité de responsable administratif montage décor. Il a été élu délégué du personnel le 8 mars 2007. Il a saisi la juridiction prud’homale le 7 février 2011, afin d’obtenir la résiliation judiciaire de son contrat de travail en raison de la violation de son statut protecteur et le paiement de diverses sommes. I a été licencié pour faute grave le 24 novembre 2011. L’Union locale CGT de Chatou (le syndicat) est intervenue volontairement à la procédure.
Le salarié ayant maintenu à titre principal sa demande de résiliation judiciaire du contrat de travail en raison de la violation de son statut protecteur, c’est sans encourir les griefs du moyen que la cour d’appel, qui a accueilli cette demande de résiliation judiciaire du contrat de travail, a rejeté la demande de réintégration présentée par le salarié et fait droit à ses demandes subsidiaires d’indemnisation.
La demande de résiliation judiciaire du contrat de travail en raison de la violation du statut protecteur fait obstacle à la demande de réintégration présentée par le salarié protégé.
- Elections professionnelles – Vote. Cass., Soc., 3 octobre 2018, N°17-29022.
Le recours au vote électronique pour les élections professionnelles, subordonné à la conclusion d’un accord collectif garantissant le secret du vote, ne permet pas de déroger aux principes généraux du droit électoral. L’exercice personnel du droit de vote constitue un principe général du droit électoral auquel seul le législateur peut déroger.
En application d’un protocole préélectoral signé au sein de l’établissement de Villabe de la société Flunch, les élections de la délégation du personnel et des membres du comité d’entreprise ont été organisées le 3 octobre 2017, avec recours au vote électronique. Invoquant le fait qu’une salariée, candidate aux élections professionnelles, ait voté en lieu et place de deux autres salariées qui lui avaient confié leur code confidentiel, l’employeur a sollicité l’annulation des élections.
Pour dire n’y avoir lieu à annulation des élections, le tribunal retient que bien que dûment informées du caractère personnel, confidentiel du vote, ne pouvant être confié à un tiers, deux salariées ont en toute connaissance de cause confié leur clé de vote à une troisième pour qu’elle vote pour elles, que la fraude n’est donc pas établie, et qu’en toute hypothèse, l’irrégularité relevée n’est pas de nature à fausser les résultats.
En statuant ainsi, le tribunal d’instance a violé les articles L. 2314-21 et L. 2324-19 du code du travail, dans leur rédaction alors applicable, ensemble les principes généraux du droit électoral.
Le recours au vote électronique pour les élections professionnelles, subordonné à la conclusion d’un accord collectif garantissant le secret du vote, ne permet pas de déroger aux principes généraux du droit électoral, auquel seul le législateur peut déroger.
Droit des affaires, concurrence, distribution et consommation
- Bail commercial – Durée. Cass., Civ., 3ème, 25 octobre 201, N°17-26126.
Le 15 février 2004, Mme X… a donné à bail dérogatoire à M. Y… et M. Z… un local commercial pour une durée de vingt-trois mois à compter du 15 février 2004, les preneurs s’engageant, à peine de caducité du contrat, à fournir une attestation de leur inscription au registre du commerce et des sociétés dans un délai de deux mois suivant la prise d’effet du bail. Trois autres baux dérogatoires de même durée ont été conclus successivement à compter du 1er février 2006, du 1er février 2008 et du 1er février 2010. Le 6 août 2013, M. Y…, laissé en possession des lieux loués, a assigné la bailleresse aux fins de voir constater qu’il était titulaire d’un bail commercial d’une durée de neuf années ayant commencé le 1er février 2006. Invoquant l’absence d’immatriculation du preneur au registre du commerce et des sociétés à la date de l’assignation, Mme X… a conclu au rejet de la demande et, à titre reconventionnel, à l’acquisition de la clause résolutoire du dernier bail dérogatoire.
Ayant relevé que le preneur avait été laissé en possession à l’expiration du premier bail dérogatoire, la cour d’appel, qui n’était pas tenue de procéder à une recherche qui ne lui était pas demandée, a retenu à bon droit, sans contradiction, que l’inscription au registre du commerce et des sociétés n’est pas nécessaire pour que s’opère un nouveau bail régi par le statut des baux commerciaux et en a exactement déduit que M. Y… était devenu titulaire d’un bail statutaire de neuf ans à la date du 1er février 2006.
- Bail commercial – Clause résolutoire. Cass., Civ., 3ème, 25 octobre 2018, N°17-16828.
Une ordonnance de référé du 6 décembre 2005 a constaté l’acquisition de la clause résolutoire prévue au contrat de bail commercial conclu entre M. et Mme Y… et la société Lunamod. L’assignation délivrée par M. et Mme Y… ne lui ayant pas été dénoncée, la société Gelied, créancière de la locataire et titulaire d’un nantissement inscrit sur le fonds de commerce, a assigné en réparation de son préjudice les bailleurs, qui ont appelé en garantie M. A…, huissier de justice, et M. B…, avocat.
Pour rejeter la demande d’indemnisation de la société Gelied, l’arrêt retient que le préjudice de cette société, qui consiste en une perte de chance de se faire payer sa créance sur le prix de vente du fonds de commerce, n’existe que si le fonds avait une valeur patrimoniale et que celle-ci ne justifie pas d’une valeur du fonds au 4 novembre 2005, date de l’assignation en résiliation du bail.
En statuant ainsi, après avoir constaté que, si l’assignation en résiliation du bail lui avait été dénoncée, la société Gelied aurait pu payer l’arriéré de loyers à la date du commandement de payer et aurait ainsi pu préserver le droit au bail et, par voie de conséquence, le fonds de commerce de la société Lunamod, lequel constituait son gage, la cour d’appel, qui n’a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations, a violé l’article L. 143-2 du code de commerce, ensemble les articles 4 et 1382, devenu 1240, du code civil.
L’avocat, investi d’un devoir de compétence, est tenu d’accomplir, dans le respect des règles déontologiques, toutes les diligences utiles à la défense des intérêts de son client.
Pour rejeter la demande en garantie formée par les bailleurs à l’encontre de l’avocat, l’arrêt retient que la mission confiée à celui-ci ne consistait qu’à rédiger l’assignation en vue de la résiliation du bail et que l’huissier de justice, à qui incombait de signifier l’assignation aux créanciers inscrits, doit être tenu pour responsable de l’erreur ayant consisté à requérir un état des inscriptions sur le fonds de la société Lunamod auprès du tribunal de grande instance du lieu du siège de la société et non auprès de celui du lieu d’exploitation du fonds de commerce.*
En statuant ainsi, alors qu’il incombe à l’avocat, qui représente les bailleurs lors de l’instance en résiliation du bail dont il a rédigé l’acte introductif, de veiller à ce que l’état des inscriptions sur le fonds de commerce émane du greffe du tribunal du lieu d’exploitation, la cour d’appel a violé l’article 1147 du code civil, dans sa rédaction antérieure à celle issue de l’ordonnance du 10 février 2016.
- Bail commercial – Validité. Cass., Civ., 2ème, 18 octobre 2018, N°17-19249
Constitue une irrégularité de fond affectant la validité de l’acte le défaut de capacité d’ester en justice.
Hélène E… , qui avait donné à bail à la société Souvenirs center, ultérieurement placée en redressement judiciaire, des locaux commerciaux, a saisi le président d’un tribunal de grande instance d’une demande tendant à la fixation du loyer du bail renouvelé. Hélène E… étant décédée au cours d’opérations d’expertise ordonnées avant dire droit, le président du tribunal, constatant que Mmes Geneviève et Béatrice E… venaient aux droits de la bailleresse, a statué au profit de ces dernières par un jugement du 18 juin 2015. Après avoir reçu la signification de ce jugement par un acte du 15 juillet 2015 mentionnant être accompli « à la demande de Mme Hélène E… », la société Souvenirs center en a interjeté appel le 29 mars 2016. Mmes Geneviève et Béatrice E… ont déféré à la cour d’appel l’ordonnance du conseiller de la mise en état rejetant leur demande tendant à ce que l’appel soit déclaré irrecevable comme tardif.
Pour dire que l’appel interjeté par la société Souvenirs center le 26 mars 2016 était irrecevable comme tardif, l’arrêt retient que cette société ne conteste pas qu’en ouverture du rapport d’expertise déposé le 16 juin 2014, Mmes Geneviève et Béatrice E… ont délivré deux mémoires successivement les 1er août 2014 et 5 mai 2015 avec indication de leur domicile et que cette société a elle-même établi deux mémoires en réponse à l’encontre de Mmes E… comme venant aux droits d’Hélène E… en date des 28 avril 2015 et 6 mai 2015, qu’il s’agit de la part de Mmes E… de deux actes de procédure valant reprise de l’instance après le décès d’Hélène E… survenu […] , que Mmes E… ont en outre délivré à la société Souvenirs center le 24 mars 2015, soit avant le jugement, commandement de payer à la société Souvenirs center en leurs noms comportant leur état civil, leur adresse et l’indication qu’elles viennent aux droits d’Hélène E… en vertu d’un bail écrit du 19 juillet 1990, le commandement portant indication de la date du décès d’Hélène E…, que la circonstance que nonobstant la délivrance des mémoires au nom et à l’intention de Mmes E… , le premier juge n’ait fait figurer en tête du jugement que le nom d’Hélène E… ne constitue, alors que le reste du jugement, motifs et dispositif, porte l’indication des consorts E…, qu’une erreur matérielle, qu’en conséquence, l’indication dans l’acte de signification lui-même du nom d’Hélène E… comme requérante ne constitue qu’un vice de forme, qui n’a causé aucun grief à la société Souvenirs center, de sorte que son appel a été interjeté plus d’un mois après la signification du jugement.
En statuant ainsi, alors que l’acte délivré au nom d’une personne décédée et comme telle dénuée de la capacité d’ester en justice est affecté d’une irrégularité de fond, peu important que le destinataire ait eu connaissance de ce décès, la cour d’appel a violé les articles 117 et 119 du code de procédure civile.
- Bail commercial – Association de commerçants. Cass., Civ. 3ème, 11 octobre 2018, N°17-23211.
La société Flunch, locataire de locaux à usage commercial appartenant à la société Carrefour et dépendant d’un centre commercial, a cessé, à compter de janvier 2014, de régler ses cotisations à l’association des commerçants du Grand Vitrolles (l’association) à laquelle elle avait adhéré en exécution d’une stipulation du bail lui en faisant obligation. L’association a assigné la société Flunch en paiement des cotisations. La locataire lui a opposé la nullité de la clause d’adhésion.
En premier lieu, ayant relevé, par une interprétation souveraine, exclusive de dénaturation, que la clause 12 du bail stipulait, en ses alinéas 1 et 2, que la société Flunch ne s’était pas engagée à participer aux frais de promotion et d’animation du centre commercial, mais à adhérer à l’association des commerçants et, en son alinéa 3, qu’en cas de retrait, le preneur restait tenu de régler à l’association sa participation financière aux dépenses engagées pour l’animation du centre commercial, de sorte que cette clause, qui entravait la liberté de ne pas adhérer à une association ou de s’en retirer en tout temps, était entachée de nullité absolue, la cour d’appel en a exactement déduit, abstraction faite du motif inopérant tiré d’une stipulation pour autrui, que la société Flunch ne s’était pas directement engagée à participer aux frais de fonctionnement de l’association et que la demande en paiement des cotisations à compter du 1er janvier 2014 devait être rejetée.
En deuxième lieu, ‘ayant retenu que le paiement des cotisations résultait de l’adhésion à l’association, que, dès lors que la société Flunch avait renoncé à son adhésion, l’association n’avait plus à la faire participer aux opérations d’animation du centre commercial et la société Flunch n’avait plus à payer les cotisations, la cour d’appel n’était pas tenue de procéder à une recherche sur le profit tiré par l’association que ses constatations rendaient inopérante.
En troisième lieu, la cour d’appel a exactement retenu que les dispositions de l’article L. 442-6 du code de commerce, invoquée par l’association sans même rechercher la responsabilité civile de la société Flunch, étaient étrangères aux rapports entretenus par l’association et un commerçant ancien adhérent.
- Consommation – Prêt. Cass., Civ., 1ère, 10 octobre 2018, N°17-20441.
Par offre de prêt acceptée le 20 mai 2011, la société Banque de Tahiti (la banque) a consenti à Mme X… (l’emprunteur) un prêt immobilier d’un montant de 30 000 000 francs CFP, remboursable en deux-cent-quarante mensualités, garanti par le cautionnement de la société Compagnie européenne de garanties et de caution (la caution), pour financer la construction d’une maison d’habitation à usage de résidence principale. En application de l’article 9 des conditions générales, qui prévoit le cas de déclaration inexacte de la part de l’emprunteur, la banque a notifié à ce dernier l’exigibilité anticipée de toutes les sommes dues au titre du prêt. La caution, subrogée dans les droits de la banque, a assigné l’emprunteur en paiement.
Le juge national est tenu d’examiner d’office le caractère abusif des clauses contractuelles invoquées par une partie dès qu’il dispose des éléments de droit et de fait nécessaires à cet effet.
Pour condamner l’emprunteur à payer à la caution une certaine somme, l’arrêt relève, d’abord, que le contrat de prêt stipule que les fonds seront débloqués en plusieurs fois, sur présentation de factures validées par l’emprunteur, indiquant la ou les prestations faites, au fur et à mesure de l’état d’avancement des travaux, et retient, ensuite, que l’insincérité des factures présentées par l’emprunteur, de nature à constituer une déclaration inexacte, justifie l’exigibilité anticipée des sommes prêtées.
En statuant ainsi, alors qu’il lui incombait de rechercher d’office le caractère abusif de la clause qui autorise la banque à exiger immédiatement la totalité des sommes dues en cas de déclaration inexacte de la part de l’emprunteur, en ce qu’elle est de nature à laisser croire que l’établissement de crédit dispose d’un pouvoir discrétionnaire pour apprécier l’importance de l’inexactitude de cette déclaration et que l’emprunteur ne peut recourir au juge pour contester le bien-fondé de la déchéance du terme, la cour d’appel a violé l’article L. 132-1, devenu L. 212-1 du code de la consommation.
- Gérants mandataires non-salariés – Lien de subordination. Cass., Soc., 10 octobre 2018, N°16-26497.
M. et Mme X… se sont vu confier par la société Casino distribution France la gérance de magasins dans le cadre d’un contrat de cogérance à titre précaire à compter du 7 janvier 2002. Ils ont saisi la juridiction prud’homale aux fins d’obtenir la requalification, dès l’origine, de leur contrat de gérants mandataires non-salariés en un contrat de travail de droit commun à durée indéterminée, le paiement d’heures supplémentaires et la résiliation du contrat aux torts de l’employeur avec toutes les conséquences indemnitaires en découlant.
Pour requalifier la relation contractuelle en un contrat de travail, l’arrêt retient qu’en l’espèce, la brièveté et la multiplicité des remplacements confiés aux époux X…, tels qu’ils ressortent des listes annuelles des intérims produits aux débats, leur interdisaient dans les faits d’envisager leur propre remplacement et l’engagement de salariés et les contraignaient à exploiter « à titre tout-à-fait précaire », comme le spécifie le contrat signé par eux avec la société Casino, les magasins confiés dans le strict respect de l’organisation mise en place par le ou les gérants mandataires remplacés, eux-mêmes astreints à de multiples règles et procédure, ce qui démontre leur absence totale de liberté dans la gestion, qu’à cet égard, des attestations concordantes des gérants « intérimaires » placés dans une situation identique à celle qui leur a été imposée par la société Casino, des salariés de cette société chargés de contrôler l’activité des gérants et des gérants remplacés, de M. X, gérant mandataire et délégué syndical, mais aussi le document intitulé « dossier intérimaires 2004 » établissent l’interdiction de modifier les horaires et jours d’ouverture et de fermeture des magasins sous peine de sanctions officielles ou financières déguisées, la prohibition de modification d’implantation des marchandises, la fixation des jours d’inventaire sans possibilité de changement, l’établissement d’un compte-rendu d’intérim à remettre au seul service commercial de la direction régionale à la fin de chaque période d’intérim, la réception à la fin de chaque année pour les couples de gérants dits intérimaires de la part de la direction de Casino d’un planning des remplacements à effectuer, et que les époux X… ont été plus particulièrement destinataires le 30 octobre 2009 d’une lettre de la société les menaçant, à la suite d’un changement mineur des horaires d’ouverture du magasin le jeudi 8 octobre précédent de mettre fin aux relations contractuelles, ce qui doit être considéré comme l’exercice à leur encontre par la société de son pouvoir disciplinaire.
En se déterminant ainsi, par des motifs, tirés de la brièveté et de la multiplicité des remplacements ainsi que de contraintes inhérentes aux conditions d’exploitation des magasins concernés, ne permettant pas à eux seuls de caractériser l’existence d’un lien de subordination juridique, la cour d’appel a privé sa décision de base légale au regard des articles L. 1221-1, L. 7322-1 et L. 7322-2 du code du travail.
- Gérants mandataires non-salariés – Contrats de travail. Cass., Soc., 10 octobre 2018, N°17-13418.
M. et Mme X… (ci-après les époux X…) ont signé avec la société Distribution Casino France (ci-après la société Casino), un contrat de gérants mandataires non-salariés. Ils ont saisi la juridiction prud’homale de diverses demandes.
Il résulte de l’article L. 7322-1 du code du travail, que les dispositions de ce code bénéficiant aux salariés s’appliquent en principe aux gérants non-salariés de succursales de commerce de détail alimentaire. Selon ce même texte, l’entreprise propriétaire de la succursale est responsable au profit des gérants non-salariés des dispositions du livre Ier de la troisième partie relatives à la durée du travail, aux repos et congés payés et à la sécurité du travail lorsque les conditions de travail, de santé et de sécurité au travail dans l’établissement ont été fixées par elles et soumises à son accord. Il en résulte que lorsque, les conditions d’application en sont réunies, les gérants non-salariés peuvent revendiquer le paiement d’heures supplémentaires et l’application des dispositions de l’article L. 3171-4 du code du travail.
Ayant retenu que si la société Casino n’imposait pas les conditions de travail, de sorte que le lien de subordination juridique caractérisant l’existence d’un contrat de travail n’était pas caractérisé, ses demandes adressées aux gérants non-salariés, concernant les horaires d’ouverture et de fermeture des succursales, de se conformer aux habitudes de la clientèle et aux coutumes locales ainsi que la diffusion par ses soins des horaires d’ouverture du commerce sur le site internet, permettaient de caractériser une vérification du respect de l’amplitude horaire dans le cadre du service organisé de succursales qu’elle dirigeait de sorte qu’il apparaissait que le respect de l’amplitude horaire était soumis à son accord, la cour d’appel, qui a caractérisé que les conditions d’application de l’article L. 7322-1 du code du travail étaient réunies, en a exactement déduit que les dispositions de l’article L. 3171-4 du code du travail s’appliquaient.
Il résulte des articles L. 2251-1, L. 7322-1, L. 7322-3, L. 2143-17, L. 2315-3, L. 3232-1, L. 3232-3, D. 3231-5 et D. 3231-6 du code du travail que le temps nécessaire à l’exercice des fonctions de représentant du personnel est de plein droit considéré comme du temps de travail et payé à l’échéance normale. Ce représentant ne doit subir aucune perte de rémunération du fait de l’exercice de sa mission. Si les accords collectifs peuvent déterminer la rémunération minimum garantie des gérants non-salariés des succursales de commerce de détail alimentaire compte tenu de l’importance de la succursale et des modalités d’exploitation de celle-ci, il demeure qu’en application de l’article L. 7322-3 du code du travail, la rémunération convenue ne peut jamais être inférieure au SMIC. En conséquence, lorsque le représentant est payé en tout ou en partie par des commissions, la somme qui lui est allouée pendant une période où du fait de ses fonctions il ne peut travailler, doit être calculée d’après son salaire réel et être au moins égale au SMIC.
Ayant constaté que les dispositions de l’accord collectif national du 18 juillet 1963 prévoyant l’indemnisation forfaitaire du gérant non salarié conduisait à lui verser une somme inférieure au montant du SMIC, la cour d’appel en a exactement déduit que ce dernier devait percevoir un rappel à ce titre.
Selon l’articles 4 de l’accord collectif national du 18 juillet 1963 concernant les gérants non-salariés des maisons d’alimentation à succursales, supermarchés, hypermarchés « gérants mandataires » du 18 juillet 1963, étendu par arrêté du 25 avril 1985 les gérances sont réparties en deux catégories, les gérances d’appoint et les gérances normales, que la seconde est assurée par deux gérants mandataires non-salariés au minimum et fait l’objet d’un contrat de cogérance. Selon l’article 5 de ce texte, les sociétés garantissent à leurs gérants mandataires non-salariés une commission mensuelle minimum, tant pour la gérance d’appoint que pour la gérance normale et à compter du 1er janvier 2015, les minima garantis sont les suivants gérance 1ère catégorie : 1 635 euros par mois, gérance 2ème catégorie : 2 380 euros par mois.
Pour condamner la société Casino à verser à Mme X… une certaine somme à titre de rappels de commissions supplémentaires mensuelles pour la période de janvier 2008 à février 2016 outre congés payés afférents, et à M. X… un rappel de congés payés à ce titre, l’arrêt, après avoir constaté que chacun des gérants réclamait l’allocation de la somme minimale garantie par l’accord collectif pour une gérance unique, retient que les dispositions du code du travail applicables aux salariés doivent trouver application en ce qui concerne la rémunération revenant individuellement à chacun des cogérants de sorte qu’il convient de dire que la rémunération devant être garantie à chacun est la rémunération conventionnelle, que toutefois, cette rémunération conventionnelle ayant été perçue par les cogérants depuis 2008, il ne peut être fait droit à la demande formée devant la cour revenant à servir cette rémunération conventionnelle à nouveau à chacun des cogérants, de sorte qu’il convient de la fixer à la somme de 102 767 euros outre congés payés afférents, de dire qu’elle devra être payée à Mme X… à titre de rappels de commissions, tout en allouant à M. X… au nom duquel les bulletins de commissions versées étaient émis, la somme de 10 263 euros au titre des congés payés sur les commissions perçues sur la base du minimum conventionnel.
En, statuant ainsi, alors qu’en cas de gérance normale, le montant de la rémunération garantie s’entend de la rémunération garantie non à chacun des cogérants mais à l’ensemble des cogérants, la cour d’appel a violé les articles 4, 5, 7 de l’accord collectif national du 18 juillet 1963 concernant les gérants non-salariés des maisons d’alimentation à succursales, supermarchés, hypermarchés « gérants mandataires » du 18 juillet 1963, étendu par arrêté du 25 avril 1985.
Libertés publiques – Droit humanitaire et des étrangers
- Etrangers – Mesure d’assignation à résidence. CE, 24 octobre 2018, 2ème et 7ème Ch. réunies, N°419229.
En adoptant les dispositions du II de l’article L. 742-4 du code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile (CESEDA), le législateur a organisé une procédure spéciale conduisant le juge administratif à statuer rapidement sur la légalité des mesures d’éloignement que sont les décisions de transfert lorsque les étrangers concernés sont placés en rétention ou assignés à résidence, sans entendre distinguer selon que la mesure d’assignation à résidence a été prise sur le fondement de l’article L. 561-2, normalement applicable, ou se présente comme ayant été prise en application de l’article L. 561-1.
Ayant retenu que si la société Casino n’imposait pas les conditions de travail, de sorte que le lien de subordination juridique caractérisant l’existence d’un contrat de travail n’était pas caractérisé, ses demandes adressées aux gérants non-salariés, concernant les horaires d’ouverture et de fermeture des succursales, de se conformer aux habitudes de la clientèle et aux coutumes locales ainsi que la diffusion par ses soins des horaires d’ouverture du commerce sur le site internet, permettaient de caractériser une vérification du respect de l’amplitude horaire dans le cadre du service organisé de succursales qu’elle dirigeait de sorte qu’il apparaissait que le respect de l’amplitude horaire était soumis à son accord, la cour d’appel, qui a caractérisé que les conditions d’application de l’article L. 7322-1 du code du travail étaient réunies, en a exactement déduit que les dispositions de l’article L. 3171-4 du code du travail s’appliquaient.
Ainsi, quand bien même la mesure d’assignation à résidence assortissant une décision de transfert se présenterait comme prise sur le fondement de l’article L. 561-1, la contestation d’une telle mesure, notifiée avec une décision de transfert, doit être faite avant l’expiration du délai de recours de quarante-huit heures et doit être jugée selon la procédure et dans le délai prévus au III de l’article L. 512-1.
- Etrangers – PACS. CE, 6ème et 5ème Ch. réunies, 22 octobre 2018, N° 407687.
Il résulte des articles 515-1 à 514-5 du code civil et de l’article 2 de la loi n° 99-944 du 15 novembre 1999 que le législateur a fait le choix de réserver le bénéfice du régime des dispositions de l’article L. 121-1 du code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile (CESEDA), qui transposent le droit de séjourner librement sur le territoire des États membres prévu par la directive n° 2004/38/CE du 29 avril 2004, aux seuls conjoints, les partenaires liés par un pacte civil de solidarité bénéficiant des dispositions de l’article 12 de la loi du 15 novembre 1999 relative au pacte civil de solidarité qui favorisent leur droit au séjour, conformément aux objectifs fixés par l’article 3, paragraphe 2, de la directive. Eu égard aux différences organisées par la loi entre ces deux formes d’union, commet une erreur de droit une cour administrative d’appel qui juge que le pacte civil de solidarité doit être regardé comme constituant un partenariat enregistré équivalent au mariage conformément à la législation de l’Etat membre d’accueil, au sens du b) du paragraphe 2 de l’article 2 de la directive du 29 avril 2004.
- Etrangers – Fichiers biométriques. Cass., Soc., 17 octobre 2018, N°17-16852.
Selon l’ordonnance attaquée, rendue par le premier président d’une cour d’appel, et les pièces de la procédure, que M. X…, de nationalité tunisienne, en situation irrégulière en France, a été placé en rétention administrative par arrêté du préfet du 12 avril 2017. Le 14 avril, M. X… a présenté au juge des libertés et de la détention une requête en contestation de la régularité de cet arrêté et le préfet une requête en prolongation de la mesure.
Pour prolonger cette mesure, l’ordonnance retient que la consultation des fichiers biométriques a nécessairement été effectuée par des personnes habilitées, qui disposent d’un code qui leur est propre.
En se déterminant ainsi, sans rechercher, comme il le lui était demandé, s’il résultait des actes de la procédure, notamment des mentions, faisant foi jusqu’à preuve contraire, du procès-verbal contenant le résultat de la consultation des fichiers, que le fonctionnaire de police les ayant consultés était expressément habilité à cet effet, le premier président a privé sa décision de base légale au regard des les articles L. 611-4 et R. 611-12 du code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile et l’article 8 du décret n° 87-249 du 8 avril 1987 relatif au fichier automatisé des empreintes digitales géré par le ministère de l’intérieur.
European Court of Justice
- Reference for a preliminary ruling — Regulation (EU) No 604/2013 — Regulation (EC) No 1560/2003 — Determination of the Member State responsible for examining an application for international protection — Criteria and mechanisms for determination — Request to take charge of or take back an asylum seeker — Negative reply from the requested Member State — Re examination request — Article 5(2) of Regulation No 1560/2003 — Time limit for replying — Expiry — Effects. ECJ, 13 November 2018, Joined Cases C-47/17 and C-48/17 X and X v Staatssecretaris van Veiligheid en Justitie.
Article 5(2) of Commission Regulation (EC) No 1560/2003 of 2 September 2003 laying down detailed rules for the application of Council Regulation (EC) No 343/2003 establishing the criteria and mechanisms for determining the Member State responsible for examining an asylum application lodged in one of the Member States by a third-country national, as amended by Commission Implementing Regulation (EU) No 118/2014 of 30 January 2014, must be interpreted as meaning that, in the course of the procedure for determining the Member State that is responsible for processing an application for international protection, the Member State which receives a take charge or take back request under Articles 21 and 23 of Regulation (EU) No 604/2013 of the European Parliament and of the Council of 26 June 2013 establishing the criteria and mechanisms for determining the Member State responsible for examining an application for international protection lodged in one of the Member States by a third-country national or a stateless person, which, after making the necessary checks, has replied in the negative to that request within the time limits laid down in Articles 22 and 25 of Regulation No 604/2013 and which, thereafter, receives a re-examination request under Article 5(2) of Regulation (EC) No 1560/2003, must endeavour, in the spirit of sincere cooperation, to reply to the re-examination request within a period of two weeks.
Where the requested Member State does not reply within that period of two weeks to the re-examination request, the additional re-examination procedure shall be definitively terminated, with the result that the requesting Member State must, as from the expiry of that period, be considered to be responsible for the examination of the application for international protection, unless it still has available to it the time needed to lodge, within the mandatory time limits laid down for that purpose in Article 21(1) and Article 23(2) of Regulation No 604/2013, a further take charge or take back request.
- Reference for a preliminary ruling — European Union Citizenship — Articles 18 and 21 TFEU — Request to a Member State by a third country seeking extradition of an EU citizen who is a national of another Member State and who has exercised his right to free movement in the first Member State — Request made for the purpose of enforcing a custodial sentence and not for the purpose of prosecution — Prohibition on extradition applied only to own nationals — Restriction on free movement — Justification based on the prevention of impunity — Proportionality.ECJ, 13 November 2018, Case C-247/17, Oikeusministeriö v Denis Raugevicius.
Articles 18 and 21 TFEU must be interpreted as meaning that, where an extradition request has been made by a third country for an EU citizen who has exercised his right to free movement, not for the purpose of prosecution, but for the purpose of enforcing a custodial sentence, the requested Member State, whose national law prohibits the extradition of its own nationals out of the European Union for the purpose of enforcing a sentence and makes provision for the possibility that such a sentence pronounced abroad may be served on its territory, is required to ensure that that EU citizen, provided that he resides permanently in its territory, receives the same treatment as that accorded to its own nationals in relation to extradition.
- Reference for a preliminary ruling — Directive 2003/86/EC — Right to family reunification — Article 15 — Refusal to grant an autonomous residence permit — National legislation providing for a requirement to pass a civic integration examination. ECJ, 7 November 2018, Case C-484/17, K v Staatssecretaris van Veiligheid en Justitie.
Article 15(1) and (4) of Council Directive 2003/86/EC of 22 September 2003 on the right to family reunification does not preclude national legislation, such as that at issue in the main proceedings, which permits an application for an autonomous residence permit, lodged by a third country national who has resided over five years in a Member State by virtue of family reunification, to be rejected on the ground that he has not shown that he has passed a civic integration test on the language and society of that Member State provided that the detailed rules for the requirement to pass that examination do not go beyond what is necessary to attain the objective of facilitating the integration of those third country nationals, which is for the referring court to ascertain.
- Reference for a preliminary ruling — Jurisdiction of the Court — Directive 2003/86/EC — Right to family reunification — Article 15 — Refusal to grant an autonomous residence permit — National legislation providing for a requirement to pass a civic integration examination. ECJ, 7 November 2018, Case C-257/17, C and A v Staatssecretaris van Veiligheid en Justitie.
The Court of Justice has jurisdiction, on the basis of Article 267 TFEU, to interpret Article 15 of Council Directive 2003/86/EC of 22 September 2003 on the right to family reunification in situations such as those at issue in the main proceedings, where a national court is called upon to rule on the grant of an autonomous residence permit to a third country national, who is a family member of an EU citizen who has not exercised his right of free movement, if that provision was made directly and unconditionally applicable to such situations under national law.
Article 15(1) and (4) of Directive 2003/86 does not preclude national legislation which permits an application for an autonomous residence permit, lodged by a third country national who has resided over five years in a Member State by virtue of family reunification, to be rejected on the ground that he has not shown that he has passed a civic integration test on the language and society of that Member State provided that the detailed rules for the requirement to pass that examination do not go beyond what is necessary to attain the objective of facilitating the integration of those third country nationals.
Article 15(1) and (4) of Directive 2003/86 does not preclude national legislation which provides that an autonomous residence permit cannot be issued earlier than the date on which it was applied for.
- Reference for a preliminary ruling — Social policy — Organisation of working time — Directive 2003/88/EC — Article 7 — Right to paid annual leave — National legislation providing for the loss of annual leave not taken and of the allowance in lieu thereof where an application for leave has not been made by the worker prior to the termination of the employment relationship — Directive 2003/88/EC — Article 7 — Obligation to interpret national law in conformity with EU law — Charter of Fundamental Rights of the European Union — Article 31(2) — Whether it may be relied upon in a dispute between individuals. ECJ, 6 November 2018, Case C-684/16, Max-Planck-Gesellschaft zur Förderung der Wissenschaften eV v Tetsuji Shimizu.
Article 7 of Directive 2003/88/EC of the European Parliament and of the Council of 4 November 2003 concerning certain aspects of the organisation of working time and of Article 31(2) of the Charter of Fundamental Rights of the European Union must be interpreted as precluding national legislation such as that at issue in the main proceedings, under which, in the event that the worker did not ask to exercise his right to paid annual leave during the reference period concerned, that worker loses, at the end of that period — automatically and without prior verification of whether the employer had in fact enabled him to exercise that right, in particular through the provision of sufficient information — the days of paid annual leave acquired under those provisions in respect of that period, and, accordingly, his right to an allowance in lieu of paid annual leave not taken in the event that the employment relationship is terminated. It is, in that regard, for the referring court to determine, taking into consideration the whole body of domestic law and applying the interpretative methods recognised by it, whether it can arrive at an interpretation of that right capable of ensuring the full effectiveness of EU law.
In the event that it is impossible to interpret national legislation such as that at issue in the main proceedings in a manner consistent with Article 7 of Directive 2003/88 and Article 31(2) of the Charter of Fundamental Rights, it follows from the latter provision that a national court hearing a dispute between a worker and his former employer who is a private individual must disapply the national legislation and ensure that, should the employer not be able to show that it has exercised all due diligence in enabling the worker actually to take the paid annual leave to which he is entitled under EU law, the worker cannot be deprived of his acquired rights to that paid annual leave or, correspondingly, and in the event of the termination of the employment relationship, to the allowance in lieu of leave not taken which must be paid, in that case, directly by the employer concerned.
- Reference for a preliminary ruling — Social policy — Organisation of working time — Directive 2003/88/EC — Article 7 — Right to paid annual leave — National legislation providing for the loss of annual leave not taken and of the payment in lieu thereof, where the worker did not submit a request for leave before the termination of the employment relationship. ECJ, 6 November 2018, Case C-619/16, Sebastian W. Kreuziger v Land Berlin.
Article 7 of Directive 2003/88/EC of the European Parliament and of the Council of 4 November 2003 concerning certain aspects of the organisation of working time must be interpreted as precluding national legislation such as that at issue in the main proceedings, in so far as it entails that, in the event that the worker did not ask to exercise his right to paid annual leave prior to the termination of the employment relationship, that worker loses — automatically and without prior verification of whether the employer had in fact enabled him, in particular through the provision of sufficient information, to exercise his right to leave prior to the termination of that relationship — the days of paid annual leave to which he was entitled under EU law on the date of the termination of that relationship, and, accordingly, his right to an allowance in lieu of paid annual leave not taken.
- Reference for a preliminary ruling — Social policy — Organisation of working time — Directive 2003/88/EC — Article 7 — Right to paid annual leave — Employment relationship terminated by the death of the worker — National legislation preventing the payment of an allowance to the legal heirs of a worker in lieu of paid annual leave not taken by him — Obligation to interpret national law in conformity with EU law — Charter of Fundamental Rights of the European Union — Article 31(2) — Whether it may be relied upon in a dispute between individuals. ECJ, 6 November 2018, C-569/16 and C-570/16, Stadt Wuppertal and Volker Willmeroth als Inhaber der TWI Technische Wartung und Instandsetzung Volker Willmeroth e. K. v Maria Elisabeth Bauer and Martina Broßonn.
Article 7 of Directive 2003/88/EC of the European Parliament and of the Council of 4 November 2003 concerning certain aspects of the organisation of working time and of Article 31(2) of the Charter of Fundamental Rights of the European Union, must be interpreted as precluding national legislation such as that at issue in the main proceedings, under which, where the employment relationship is terminated by the death of the worker, the right to paid annual leave acquired under those provisions and not taken by the worker before his death lapses without being able to give rise to a right to an allowance in lieu of that leave which is transferable to the employee’s legal heirs by inheritance.
Where it is impossible to interpret a national rule such as that at issue in the main proceedings in a manner consistent with Article 7 of Directive 2003/88 and Article 31(2) of the Charter of Fundamental Rights, the national court, before which a dispute between the legal heir of a deceased worker and the former employer of that worker has been brought, must disapply that national legislation and ensure that the legal heir receives payment from the employer of an allowance in lieu of paid annual leave acquired under those provisions and not taken by the worker before his death. That obligation on the national court is dictated by Article 7 of Directive 2003/88 and Article 31(2) of the Charter of Fundamental Rights where the dispute is between the legal heir and an employer which has the status of a public authority, and under the second of those provisions where the dispute is between the legal heir and an employer who is a private individual.