07 Juin NEWSLETTER – JUIN 2014
Droit du travail et sécurité sociale
- Restriction de la liberté des salariés de manifester leurs convictions religieuses sur leur lieu de travail – Licenciement ; Cour de cassation, Assemblée plénière, 25 juin 2014, n° 13-28.369, L. c/ Assoc. Baby-Loup,
http://www.courdecassation.fr/jurisprudence_2/assemblee_pleniere_22/612_25_29566.html
Par arrêt du 25 juin 2014, l’Assemblée plénière de la Cour de cassation a rejeté le pourvoi formé par Mme X…, épouse Y…, directrice adjointe de la crèche et halte-garderie gérée par l’association Baby-Loup, licenciée par son employeur à la suite du refus d’ôter son voile, contre l’arrêt de la cour d’appel de Paris ayant rejeté son recours.
L’Assemblée plénière précise les conditions auxquelles une personne privée, en l’espèce une association, peut restreindre la liberté de ses salariés de manifester leurs convictions religieuses sur leur lieu de travail.
Elle rappelle qu’en application des articles L. 1121-1 et L. 1321-3 du code du travail, les restrictions à la liberté du salarié de manifester ses convictions religieuses doivent être justifiées par la nature de la tâche à accomplir et proportionnées au but recherché. Le règlement intérieur d’une entreprise privée ne peut en effet instaurer de restrictions générales et imprécises à une liberté fondamentale.
L’association Baby-Loup avait inscrit dans son règlement intérieur la règle selon laquelle “ le principe de la liberté de conscience et de religion de chacun des membres du personnel ne peut faire obstacle au respect des principes de laïcité et de neutralité qui s’appliquent dans l’exercice de l’ensemble des activités développées, tant dans les locaux de la crèche ou ses annexes qu’en accompagnement extérieur des enfants confiés à la crèche”. Le licenciement de Mme Y… avait été prononcé sur le fondement de la violation de cette règle
L’Assemblée plénière approuve la cour d’appel d’avoir déduit du règlement intérieur que la restriction à la liberté de manifester sa religion qu’il édictait ne présentait pas un caractère général, mais était suffisamment précise, justifiée par la nature des tâches accomplies par les salariés de l’association et proportionnée au but recherché.
La cour d’appel a, en effet, apprécié de manière concrète les conditions de fonctionnement de l’association, laquelle était de dimension réduite, puisqu’employant seulement dix-huit salariés, qui étaient ou pouvaient être en relation directe avec les enfants et leurs parents. Il n’en résulte pas pour autant que le principe de laïcité, entendu au sens de l’article 1er de la Constitution, est applicable aux salariés des employeurs de droit privé qui ne gèrent pas un service public.
L’Assemblée plénière constate, en revanche, que l’association Baby-Loup ne pouvait être qualifiée d’entreprise de conviction, dès lors qu’elle avait pour objet, non de promouvoir et de défendre des convictions religieuses, politiques ou philosophiques, mais de développer une action orientée vers la petite enfance en milieu défavorisé et d’oeuvrer pour l’insertion sociale et professionnelle des femmes, sans distinction d’opinion politique et confessionnelle.
Mettant ainsi un terme au litige opposant Mme Y… à l’association Baby-Loup, l’Assemblée plénière de la Cour de cassation juge, en conséquence, que la cour d’appel a pu retenir que le licenciement de Mme Y… était justifié. (Communiqué : http://www.courdecassation.fr/jurisprudence_2/assemblee_pleniere_22/arret_n_29565.html).
- Résiliation judiciaire du contrat. Cour de cassation, Soc., 30 avril 2014, N°13-10772.
- X… a été engagé par la Société de réalisations informatiques diverses en qualité de technicien micro-réseau position 2.1 coefficient 275 selon l’annexe I à la convention collective nationale des bureaux d’études techniques, des cabinets d’ingénieurs-conseils et des sociétés de conseils (Syntec) du 15 décembre 1987, applicable aux relations contractuelles. Il a, le 4 décembre 2009, saisi la juridiction prud’homale notamment d’une demande en résiliation judiciaire de son contrat de travail aux torts de l’employeur dont il a été débouté le 20 janvier 2011. Le salarié a interjeté appel le 22 février 2011. Il a, le 18 mai 2011, démissionné sans réserve, sa démission prenant effet le 22 juin 2011.
Lorsque, au moment où le juge statue sur une action du salarié tendant à la résiliation judiciaire de son contrat de travail aux torts de l’employeur, le contrat de travail a pris fin par la démission du salarié, sa demande de résiliation devient sans objet. L’intéressé a la faculté, si les griefs qu’il faisait valoir au soutien de sa demande étaient justifiés, de demander la réparation du préjudice en résultant. Si, à la demande du salarié, la démission a été requalifiée en prise d’acte par le juge, celui-ci doit, pour l’appréciation du bien-fondé de la prise d’acte, prendre en considération les manquements de l’employeur invoqués par le salarié tant à l’appui de la demande de résiliation judiciaire devenue sans objet qu’à l’appui de la prise d’acte.
Après avoir constaté que le salarié avait, postérieurement à sa demande en résiliation judiciaire du contrat de travail, démissionné sans réserve et n’avait pas demandé la requalification de sa démission en prise d’acte de la rupture, l’arrêt prononce la résiliation judiciaire du contrat de travail aux torts de l’employeur.
En statuant ainsi, la cour d’appel a violé les articles L. 1221-1, L. 1237-1 du code du travail et 1184 du code civil.
- Congé de maternité. Cour de cassation, Soc., 30 avril 2014, N°13-12321.
Mme X…, engagée le 14 janvier 2000 par la société Foncia groupe en qualité de responsable juridique, a occupé, à partir de l’année 2003, le poste de directrice juridique développement. A la suite de son congé maternité qui s’est achevé le 7 septembre 2004, elle a pris ses congés payés du 8 septembre au 20 octobre 2004. Convoquée par une lettre remise en main propre le 21 octobre 2004 à un entretien préalable, elle a été licenciée le 16 novembre pour motif personnel et a saisi la juridiction prud’homale.
La cour d’appel a exactement décidé que la période de protection de quatre semaines suivant le congé de maternité étant suspendue par la prise des congés payés, son point de départ était reporté à la date de la reprise du travail par la salariée.
Pour dire le licenciement nul et condamner l’employeur à payer à la salariée diverses sommes, l’arrêt retient que le licenciement a été prononcé le 16 novembre 2004 pendant la période de protection qui s’achevait le 17 novembre 2004.
En se déterminant ainsi, sans rechercher, comme il lui était demandé si le licenciement n’était pas justifié par une faute grave, non liée à l’état de grossesse ou par l’impossibilité de maintenir le contrat de travail pour un motif étranger à la grossesse ou à l’accouchement, la cour d’appel n’a pas donné de base légale au regard des articles L. 1225-4, L. 1225-17 et L. 1225-71 du code du travail.
La période de protection de quatre semaines suivant le congé de maternité étant suspendue par la prise des congés payés, son point de départ est reporté à la date de la reprise du travail par la salariée.
- Statut collectif du travail. Cour de cassation, Soc., 24 avril 2014, N°12-10.196 et 12-10.219
- X… a été engagé par la caisse d’épargne d’Auvergne et du Limousin(la caisse). La Caisse nationale des caisses d’épargne et de prévoyance a dénoncé, le 20 juillet 2001, divers accords collectifs nationaux et locaux applicables au sein des entreprises du réseau des caisses d’épargne, dont l’un, du 19 décembre 1985, prévoyait le versement, outre d’un salaire de base, de primes de vacances, familiale et d’expérience, et d’une “gratification de fin d’année treizième mois”. Aucun accord de substitution n’a été conclu à l’expiration des délais prévus à l’article L. 2261-13 du code du travail. Un accord collectif du 11 décembre 2003 entrant en vigueur le 1er janvier 2004, a instauré une rémunération minimale conventionnelle.
Par deux engagements unilatéraux, la Caisse nationale a, d’une part, fait bénéficier les salariés présents dans l’entreprise à l’expiration des délais prévus à l’article L. 2261-13 du code du travail des modalités d’évolution de la gratification de fin d’année, devenue un avantage individuel acquis, prévues par l’accord dénoncé, et, d’autre part, accordé aux salariés engagés postérieurement une prime de treizième mois répondant aux mêmes conditions d’ouverture, de calcul et de règlement. Estimant ne pas avoir été rempli de ses droits, M. X… a saisi la juridiction prud’homale de demandes en paiement de diverses sommes.
La principe d’égalité de traitement ne s’oppose pas à ce que l’employeur fasse bénéficier, par engagement unilatéral, les salariés engagés postérieurement à la dénonciation d’un accord collectif d’avantages identiques à ceux dont bénéficient, au titre des avantages individuels acquis, les salariés engagés antérieurement à la dénonciation de l’accord.
La cour d’appel, qui a constaté, sans dénaturer les bulletins de paie, que le salarié avait effectivement perçu, au mois de décembre de chaque année, la gratification de fin d’année prévue par l’accord du 19 décembre 1985, et retenu à bon droit que l’engagement unilatéral pris par la caisse de faire bénéficier les salariés engagés postérieurement à la dénonciation de l’accord collectif d’une prime de treizième mois identique à la gratification de fin d’année payée en tant qu’avantage individuel acquis aux salariés engagés antérieurement à la dénonciation n’avait pas eu pour effet de supprimer le dit avantage, a, par ces seuls motifs, légalement justifié sa décision.
Aux termes l’article 2 de l’accord collectif national de la Caisse nationale des caisses d’épargne et de prévoyance sur la rémunération annuelle minimale du 11 décembre 2003, la rémunération brute annuelle, en dehors des sommes éventuellement versées au titre de la participation, de l’intéressement ou de la part variable de chaque salarié à temps complet, doit être au moins égale à la rémunération brute annuelle minimale du niveau de classification de l’emploi occupé.
Pour dire que le salarié avait, pour la période en litige, perçu une rémunération inférieure à la rémunération annuelle minimale prévue par l’accord du 11 décembre 2003 et correspondant à sa classification, et condamner l’employeur au paiement d’un rappel de salaire à ce titre et de dommages intérêts, l’arrêt retient que les avantages individuels acquis résultant des accords dénoncés et non suivis, dans les délais prévus à l’article L. 2261-13 du code du travail, d’accords de substitution, et le complément de rémunération dont bénéficient les salariés, lesquels sont des éléments de rémunération qui ne sont pas la contrepartie directe de la prestation de travail, doivent, sous peine de voir remettre en cause leur existence, être exclus de l’assiette de comparaison avec la rémunération annuelle minimale.
En statuant ainsi, alors que les avantages individuels acquis et le complément de rémunération ne font pas partie, dans l’accord instituant une rémunération annuelle minimale conventionnelle, des éléments exclus de l’assiette de comparaison pour déterminer la dite rémunération, la cour d’appel a violé le texte susvisé.
Par un arrêt rendu le 24 avril 2013, la chambre sociale de la Cour de cassation précise la portée d’un accord relatif à la rémunération annuelle minimale ainsi que la portée d’engagements unilatéraux applicables au sein des entreprises du réseau des caisses d’épargne. S’agissant de l’accord relatif à la rémunération annuelle minimale, la Cour confirme sa jurisprudence selon laquelle, lorsque les partenaires sociaux ont précisé les éléments de rémunération exclus du minimum conventionnel, il faut s’en tenir strictement à cette définition, sous peine de violer la convention ou l’accord collectif. La chambre sociale affirme également que le principe d’égalité de traitement ne s’oppose pas à ce que l’employeur fasse bénéficier, par engagement unilatéral, les salariés engagés postérieurement à la dénonciation d’un accord collectif d’avantages identiques à ceux dont bénéficient, au titre des avantages individuels acquis, les salariés engagés antérieurement à la dénonciation de l’accord.
- Contentieux de la désignation des représentants du personnel – Compétence du juge d’instance. Cour de cassation, Soc., 9 avril 2014,
N°13-20196.
En vertu des dispositions combinées de l’article 31-3 de la loi du 2 juillet 1990, de l’article 1er du décret du 31 mai 2011 et de l’article L. 4613-3 du code du travail, le juge d’instance est seul compétent pour se prononcer sur les contestations relatives à la désignation des représentants du personnel au CHSCT et, par suite, sur celles relatives au nombre de ces représentants et à leur répartition entre les organisations syndicales, leur désignation, si elle n’est pas contestée dans le délai de quinze jours.
- Salarié protégé – Mise à pied. Cour de cassation, Crim., 8 avril 2014, N°12-85800.
- Y…, délégué syndical et membre suppléant du comité d’entreprise de la société Ames Europe, a été mis à pied à titre conservatoire à deux reprises, et a ensuite fait, à chaque fois, l’objet d’une demande d’autorisation de licenciement qui a été rejetée. A la suite d’un procès-verbal dressé par l’inspection du travail, M. X…, président directeur-général de la société, a été poursuivi pour entraves aux fonctions de délégué syndical et au fonctionnement du comité d’entreprise en raison des mises à pied injustifiées de M. Y…, en l’absence de faute grave, ainsi que pour harcèlement moral. Le tribunal correctionnel ayant relaxé le prévenu, M. Y… et le syndicat CFE CGC Textile ont interjeté appel.
Pour infirmer le jugement entrepris et déclarer en conséquence les parties civiles recevables en leurs demandes, l’arrêt attaqué retient que les mises à pied de M. Y… ont été fondées sur des faits dépourvus de tout caractère fautif. Les juges ajoutent que l’examen des motifs de ces mises à pied traduit la volonté de faire obstacle à l’exercice, par l’intéressé, de ses fonctions représentatives.
En déterminant ainsi, sans rechercher plus précisément les agissements qui auraient entravé les fonctions représentatives de l’intéressé, alors que la seule mise à pied d’un salarié protégé, qui ne suspend pas l’exécution de son mandat, ne constitue pas en soi une telle entrave, la cour d’appel n’a pas justifié sa décision.
- Comité d’entreprise et d’établissement – Recours à un expert-comptable. Cour de cassation, Soc., 8 avril 2014, N°13-10541.
La société DHL aviation (France) appartient à l’unité économique et sociale (UES) formée par cinq autres sociétés du groupe DHL. Le comité d’entreprise de cette société, devenu comité d’établissement, a décidé le 26 janvier 2011 d’avoir recours au cabinet d’expertise-comptable Sofrageco afin qu’il l’assiste dans l’analyse des comptes de la société DHL aviation pour son exercice 2010 et pour la vérification de la participation. Le 18 juillet 2011, la société DHL aviation a refusé de satisfaire à la demande de provision lui ayant été présentée par le cabinet Sofrageco, au motif qu’une expertise de même nature avait été confiée le 6 juillet précédent au cabinet Aost Consulting par le comité central d’entreprise de l’UES.
Il appartient au seul comité d’établissement d’apprécier l’opportunité de se faire assister d’un expert pour l’examen des comptes de cet établissement, sans que le droit du comité central d’entreprise d’être lui-même assisté pour l’examen annuel des comptes de l’entreprise ne soit de nature à le priver de cette prérogative.
- Licenciement pour faute grave – Refus d’affectation. Cour de cassation, Soc., 2 avril 2014, N°12-19573.
- X… a travaillé au service de la société Dechiron, aux droits de laquelle se trouve la société Vinci construction terrassement, en qualité de chef d’équipe à compter du 1er octobre 1996, puis en qualité d’assistant chef de chantier à compter du 1er août 2009. Il a été licencié pour faute grave par lettre du 22 septembre 2009, l’employeur lui reprochant ses refus successifs d’affectation sur deux chantiers d’autoroute, le premier en Gironde et le second dans les Pyrénées-Atlantiques. Contestant le bien-fondé de son licenciement, le salarié a saisi la juridiction prud’homale.
Le salarié fait grief à l’arrêt de dire son licenciement fondé sur une faute, alors, selon le moyen, que si l’affectation occasionnelle d’un salarié en dehors du secteur géographique où il travaille habituellement ou des limites prévues par une clause contractuelle de mobilité géographique peut ne pas constituer une modification de son contrat de travail, il n’en est ainsi que lorsque cette affectation est motivée par l’intérêt de l’entreprise, qu’elle est justifiée par des circonstances exceptionnelles, et que le salarié est informé dans un délai raisonnable du caractère temporaire de l’affectation et de sa durée prévisible.
En estimant que M. X… ne pouvait, sans commettre une faute grave, refuser de rejoindre l’affectation temporaire sur un autre chantier qui lui était imposée par l’employeur, sans constater qu’il avait été informé de la durée prévisible de sa nouvelle affectation et sans relever l’existence de circonstances exceptionnelles, la cour d’appel a privé sa décision de base légale au regard des articles L. 1232-1 du code du travail et 1134 du code civil.
- Horaires de travail – Modifications de conditions de travail. Cour de cassation, Soc., 2 avril 2014, N°13-11060.
La modification des horaires de travail ne constitue pas une modification du contrat de travail mais un simple changement des conditions de travail relevant du pouvoir de direction de l’employeur, la cour d’appel, qui a retenu que le changement des horaires de travail de la salariée ne faisait pas obstacle à l’exercice de son mandat électif régi par les articles L. 2123-1 et suivants du code général des collectivités territoriales, a pu en déduire que la salariée ne justifiait d’aucun motif légitime pour refuser le changement de ses horaires de travail.
Droit des affaires, concurrence, distribution et consommation
- Bail commercial – SCI. Cour de cassation, Civ., 3ème, 9 avril 2014, N°13-11640.
La société Fineximmo, aux droits de laquelle se trouve la société civile immobilière France d’Outremer (la SCI), a donné à bail un local à usage commercial à compter du 1er janvier 1994 à la société Technologie de santé Côte d’Azur. La société Bastide, venant aux droits de celle-ci, a demandé le renouvellement du bail le 23 janvier 2003. En 2006 la SCI a assigné la locataire en résiliation du bail.
Ayant relevé que l’assemblée générale de la société Bastide-le confort médical, devenue l’unique associé de la société de Technologie de santé Côte d’Azur, avait décidé la dissolution de celle-ci et que cette dissolution avait entraîné la transmission universelle du patrimoine de la société dissoute, incluant le droit au bail dont elle était titulaire, à l’associé unique qui s’était substitué à elle dans tous les biens, droits et obligations, la cour d’appel, qui n’était pas tenue de procéder à une recherche qui ne lui était pas demandée, en a exactement déduit qu’il ne s’agissait pas d’une cession de bail et que l’autorisation du bailleur prévue à cette fin n’était pas requise.
- Bail commercial – Clause de préemption. Cour de cassation, Civ. 3ème, 9 avril 2014, N°13-13949.
La société Laboratoire Fuca devenue Laboratoire Hépatoum a pris à bail des locaux commerciaux situés dans un immeuble appartenant à M. et Mme X….Le bail contenait une clause dite de droit de préemption suivant laquelle le bailleur accorderait un tel droit au profit du preneur en cas de vente des locaux faisant l’objet du bail et lui fournirait à cette occasion une copie de l’offre d’achat qui lui serait faite pour les locaux. L’immeuble a été vendu en son intégralité à la société Brenor (la SCI) et la société Laboratoire Hépatoum, soutenant que cette vente avait eu lieu en fraude de son droit de préemption, a assigné M. et Mme X… et M. A…, à titre personnel et en sa qualité de dirigeant de la SCI, aux fins d’annulation de la vente.
Ayant relevé que la société Laboratoire Hépatoum entendait exercer son droit de préemption sur les seuls locaux objet du bail et retenu que l’application de la clause litigieuse ne saurait conduire à imposer aux propriétaires de diviser leur bien en vue de le céder à des personnes distinctes, la cour d’appel, abstraction faite d’un motif surabondant, a pu en déduire, sans dénaturation, que la demande devait être rejetée.
- Lettre de change. Cour de cassation, Com., 1er avril 2014, N°13-16902.
Il résulte de la combinaison des articles L. 511-7, alinéa 4, et L. 511-21, alinéa 7, du code de commerce que l’avaliste d’une lettre de change, tenu de la même manière que celui qu’il garantit, peut se voir opposer la présomption de provision qui s’attache à l’acceptation et que pour combattre cette présomption, il lui incombe, comme au tiré accepteur, d’établir le défaut de provision.
La société Samse a tiré une lettre de change sur la société ECB entreprise X… bâtiment qui l’a acceptée. M. X…, gérant de celle-ci, a avalisé cette lettre de change et la société Samse a assigné M. X… en paiement. Pour rejeter cette demande, l’arrêt, après avoir énoncé que la présomption de provision résultant de l’article L. 511-7, alinéa 4, du code de commerce ne s’applique que dans les rapports entre le tiré accepteur et le tireur, retient que la société Samse ne rapporte pas la preuve d’une provision à l’échéance de la lettre de change. En statuant ainsi, la cour d’appel a violé les textes susvisés.
- Consommation – Contrat de cautionnement. Cour de cassation, Com., 1er avril 2014, N°13-11313.
- X… (la caution) s’est rendu sous-caution par acte du 30 août 2006, puis caution par actes des 9 mai 2007 et 8 août 2008 envers la société BNP Paribas (la banque) de divers concours consentis à la société Fast and Serious (la société) dont il était le gérant.
La banque a assigné en paiement la caution, qui a opposé la disproportion manifeste de ses biens et revenus à ses engagements et sollicité la déchéance de son droit aux intérêts contractuels.
Il résulte de la combinaison des articles 1315 du code civil et l’article L. 341-4 du code de la consommation qu’il incombe au créancier professionnel qui entend se prévaloir d’un contrat de cautionnement manifestement disproportionné lors de sa conclusion aux biens et revenus de la caution, personne physique, d’établir qu’au moment où il l’appelle, le patrimoine de celle-ci lui permet de faire face à son obligation.
Pour condamner la caution à payer à la banque une certaine somme, après avoir constaté la disproportion de ses engagements souscrits les 9 mai 2007 et 8 août 2008, l’arrêt retient que celle-ci ne rapporte pas la preuve de sa situation financière au moment où elle a été appelée.
Des précisions sur le contrat de cautionnement.
Libertés publiques – Droit humanitaire et des étrangers
- Etrangers – Rétention administrative. Cour de cassation, Civ. 1ère, 30 avril 2014, N°13-50055.
Mme X…, de nationalité arménienne, a été retenue par les autorités policières aux fins de vérification du droit au séjour le 22 juillet 2013 et informée de ses droits à 16 heures 50, elle a indiqué vouloir contacter son mari, à qui elle a téléphoné à 17 heures 30. Suite à cette procédure, elle a été placée en rétention et un juge des libertés et de la détention a ordonné la prolongation de sa rétention.
Pour déclarer la procédure ayant précédé immédiatement le placement en rétention administrative irrégulière et mettre fin à la rétention de Mme X…, l’ordonnance énonce qu’en absence de justification de ce qu’elle s’est volontairement abstenue d’appeler son mari immédiatement et de circonstances insurmontables ayant empêché qu’elle puisse le faire, celle-ci n’a pas été mise en mesure d’exercer le droit garanti par l’article L. 611-1-1 du code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile.
En statuant ainsi, alors que le droit de prévenir à tout moment sa famille et toute personne de son choix n’impose pas de diligence immédiate, dès lors que l’exercice effectif du droit de la personne retenue est mis en oeuvre dans un délai raisonnable, le premier président a violé l’’article L. 611-1-1 du code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile.
- Mineur étranger isolé – Hébergement d’urgence. Conseil d’État, Juge des référés, 12 mars 2014, N° 375956.
Si un mineur non émancipé ne dispose pas, en principe, de la capacité pour agir en justice, il peut cependant être recevable à saisir le juge des référés, lorsque des circonstances particulières justifient que, eu égard à son office, ce dernier ordonne une mesure urgente sur le fondement de l’article L. 521-2 du code de justice administrative. Tel est notamment le cas lorsqu’un mineur étranger isolé sollicite un hébergement qui lui est refusé par le département, auquel le juge judiciaire l’a confié.
Cour de Justice de l’Union Européenne/ Court of Justice of the European Union
- Request for a preliminary ruling — Directive 93/13/EEC — Thirteenth recital in the preamble — Article 1(2) — Consumer contracts — Mortgage loan agreement — Mortgage enforcement proceedings — National statutory and regulatory provisions — Contractual balance. ECJ, 30 April 2014 Case C280/13, Barclays Bank SA v. Sara Sánchez García, Alejandro Chacón Barrera.
Council Directive 93/13/EEC of 5 April 1993 on unfair terms in consumer contracts and the principles of EU law relating to consumer protection and a balance in the parties’ rights and obligations must be interpreted as meaning that statutory and regulatory provisions of a Member State, such as those at issue in the main proceedings, are excluded from their scope, when there is no contractual term altering the effect or ambit of those provisions.
- Directive 93/13/EEC — Unfair terms in a contract concluded between a seller or supplier and a consumer — Articles 4(2) and 6(1) — Assessment of the unfairness of the contractual terms — Exclusion of terms relating to the main subjectmatter of the contract or the adequacy of the price and the remuneration provided they are drafted in plain intelligible language — Consumer credit contracts denominated in foreign currency — Terms relating to the exchange rate — Difference between the buying rate of exchange applicable to the advance of the loan and the selling rate of exchange applicable to its repayment — Powers of the national court when dealing with a term considered to be unfair — Substitution of the unfair term by a supplementary provision of national law — Whether lawful. ECJ, 30 April 2014, Case C26/13, Árpád Kásler, Hajnalka Káslerné Rábai v. OTP Jelzálogbank Zrt.
Article 4(2) of Council Directive 93/13/EEC of 5 April 1993 on unfair terms in consumer contracts must be interpreted as meaning that:
– the expression the ‘main subjectmatter of a contract’ covers a term, incorporated in a loan agreement denominated in foreign currency concluded between a seller or supplier and a consumer and not individually negotiated, such as that at issue in the main proceedings, pursuant to which the selling rate of exchange of that currency is applied for the purpose of calculating the repayment instalments for the loan, only in so far as it is found, which it is for the national court to ascertain having regard to the nature, general scheme and stipulations of the contract and its legal and factual context, that that term lays down an essential obligation of that agreement which, as such characterises it;
– such a term, in so far as it contains a pecuniary obligation for the consumer to pay, in repayment of instalments of the loan, the difference between the selling rate of exchange and the buying rate of exchange of the foreign currency, cannot be considered as ‘remuneration’ the adequacy of which as consideration for a service supplied by the lender cannot be the subject of an examination as regards unfairness under Article 4(2) of Directive 93/13.
Article 4(2) of Directive 93/13 must be interpreted as meaning that, as regards a contractual term such as that at issue in the main proceedings, the requirement that a contractual term must be drafted in plain intelligible language is to be understood as requiring not only that the relevant term should be grammatically intelligible to the consumer, but also that the contract should set out transparently the specific functioning of the mechanism of conversion for the foreign currency to which the relevant term refers and the relationship between that mechanism and that provided for by other contractual terms relating to the advance of the loan, so that that consumer is in a position to evaluate, on the basis of clear, intelligible criteria, the economic consequences for him which derive from it.
Article 6(1) of Directive 93/13 must be interpreted as meaning that, in a situation such as that at issue in the main proceedings, in which a contract concluded between a seller or supplier and a consumer cannot continue in existence after an unfair term has been deleted, that provision does not preclude a rule of national law enabling the national court to cure the invalidity of that term by substituting for it a supplementary provision of national law.
- Reference for a preliminary ruling — Consumer information and protection — Regulation (EC) No 1924/2006 — Nutrition and health claims made on foods — Labelling and presentation of those foods — Article 10(2) — Temporal application — Article 28(5) and (6) — Transitional measures). ECJ, 10 April 2014, Case C-609/12, Ehrmann AG v. Zentrale zur Bekämpfung unlauteren Wettbewerbs eV.
Regulation (EC) No 1924/2006 of the European Parliament and of the Council of 20 December 2006 on nutrition and health claims made on foods, as amended by Commission Regulation (EU) No 116/2010 of 9 February 2010 must be interpreted as meaning that the obligations to provide information laid down in Article 10(2) of that regulation were already in force in 2010 as regards health claims that were not prohibited on the basis of Article 10(1), read in conjunction with Article 28(5) and (6) of that regulation.